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Bulletin de l’association des personnels de la «5»          

Base aérienne de Seynes – 84871 ORANGE Cedex

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En ce début d’automne, je suis tenté de faire une piqure de rappel sur la dissonance cognitive car nous la trouvons dans tous les actes de la vie de nos dirigeants au plus haut niveau et je crains que l’on ne l’enseigne toujours pas dans les grandes écoles de nos élites sinon ça se saurait.

La dissonance cognitive est un processus psychologique qui a une grande importance dans la prise de décisions des hauts responsables. Il peut être formulé ainsi:

« Une fois la décision prise et l'action engagée dans une certaine direction, l'état mental du décisionnaire évolue complètement. L'objectivité s'éloigne, la partialité et le parti pris dominent. L'étendue de la dissonance est d’autant plus grande que celui qui la subi est dans un poste de haute responsabilité et que la décision est importante ».

En revenant au latin pour ceux qui en ont encore fait on peut dire aussi :

Errare humanum est, perseverare diabolicum 

Très bonne et très douce année 2016


SOMMAIRE DU No 71

EDITORIAL
7 octobre 2015 le général Saint Cricq a rendu son âme à Dieu.
Le général Robineau et ses piqures de rappel,
Le risque d’éjection au-dessus de la Syrie est réel
Vive la technocratie. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises...
L'armée de l'air célèbre les 80 ans du parachutisme militaire 
Dans le N° 52 de notre revue je vous ai parlé d’André Georges Lafitte. Je retranscrits in extenso ci-dessous le document.
En 1961 Le capitaine Claude BRUNET de l’escadron 2/5 arrive à Méchéria pour commander l’escadrille « du Petit Prince » succédant au Capitaine Le Coz. Lors de sa première mission opérationnelle il vit une expérience militaire et humaine exceptionnelle. Avec son autorisation nous publions le récit de ces moments intenses.
Nous ont quittés: ROGER DELCAMP JACQUES GERMAIN





Nous sommes le 7 octobre 2015 le général Saint Cricq a rendu son âme à Dieu.

Contrairement à certains il a souhaité que nulle manifestation ostentatoire soit organisée aux Invalides. Seulement un recueillement de ses fidèles.

Depuis 1957 ma date d’entrée dans ce métier j’ai eu l’occasion de voir les différents chefs d’Etat-major aux affaires. Je sais qu’il est de tradition de ne pas noter ses chefs. Pour ma part je l’ai toujours fait pour être fidèle à ma devise « Memento Semper » pour ne pas faire les mêmes erreurs que celles que j’ai eu l’occasion de voir commettre. Donc contrairement à ce que certains publient, je ne suis pas « un peu conservateur » la preuve je vous donne mon Top 3 des CEMAA (!!), Il y a eu à mon sens trois CEMAA qui ont largement dépassé les autres de la tête et des épaules. Je les citerai par ordre d’ancienneté ce qui ne sera contesté par personne.

Le général A. MARTIN qui a forgé la FATac-1ère RA le CAFDA, les FAS, qui nous a donné la 1257 sur l’organisation des bases aériennes que l’on a modifié 30 ans après pour moins bien ! Son organisation a duré 30 ans ! J’avais rencontré le général à Strasbourg en 94, nous avions échangé nos visions et il m’avait dit «  je ne comprends pas pourquoi vous avez supprimé les escadres, nous y avions pensé et nous avons renoncé, il y avait plus d’inconvénients que d’avantages » Ayant été témoin et non acteur de cette régression je n’ai pu lui répondre, mais la recréation récente des escadres en 2015 lui a donné raison.

Ensuite il y a eu le général SAINT CRICQ qui a remis l’Armée de l'Air à sa place par rapport aux autres armées, qui a eu une vision stratégique et planétaire de notre action. Il a recréé les commandos et il nous a donné un outil de protection digne de ce nom. Là encore dans une conversation privé, il m’avait dit »à la fin de la guerre d’Algérie, j’ai été témoin de l’humiliation des Commandos Parachutistes de l’Air et je me suis promis à ce moment-là d’œuvrer pour leur redonner la place qu’ils doivent avoir » Il a durci nos installations et transformé le cadre de vie sur les bases.

Le troisième est le général D. MERCIER je reviendrai sur son action dans une page dédiée

Bon vent au général Saint Cricq, merci pour votre action à la tête de l’Armée de l'Air.
Nous sommes nombreux à être fier d’avoir servi sous vos ordres.


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Il y a longtemps que je n’ai pas cité le général Robineau et ses piqures de rappel, je suis tenté de le concurrencer :

Je viens d’entendre sur une nos chaines nationales naturellement porteuse de notre langue française

« Il a été casté » Non mes amis il n’a pas subi le supplice d’Abélard dans une mauvaise connaissance de l’orthographe, non, sans le contexte j’aurais eu des difficultés à comprendre. La traduction est la suivante "il a subi un casting" et " il a été retenu" Il aurait pu subir une sélection et être sélectionné !!!

Dans le même esprit, quand nous jouions au rugby c’était contre les anglais, contre le Racing ou la BAN de Nîmes. Non, aujourd’hui par un anglicisme désolant, on "play" les toulonnais, ou on "fly" le Rafale,. C’est un choc culturel j’ai toujours volé sur M2000 C, sur SMB2, sur MF 1 ou sur M III, alors voler le 2000 C me trouble !!!


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Le risque d’éjection au-dessus de la Syrie est réel

Ce risque est réel en particulier pour les M2000 D (situation moins probable sur Rafale étant donné qu'il est biréacteur) et il est évidemment pris en compte par l'Armée de l'Air, d'autant plus après que l'Organisation Etat Islamique ait brûlé vif un pilote de chasse jordanien en Décembre 2014 après son éjection en territoire hostile. L’Armée de l'Air compte sur les américains pour assurer la capacité de sauvetage des équipages.

Dans cette occurrence je voudrai rappeler les capacités de RESCO pendant la première guerre du Golfe. Initialement la RESCO n’était pas prévue. J’ai estimé que le risque était inacceptable et j’ai demandé au COTAM d’envoyer deux Puma SATER (la RESCO AAir était balbutiante à cette époque) pour récupérer nos pilotes. Le commandant du COTAM m’a répondu « je ne peux pas te donner deux Puma ou alors tes avions (de la FATac ndlr) ne pourrons plus tirer à ZARA ». Erreur d’appréciation dans le choix des priorités et après un arbitrage chez le CEMAA les deux Puma ont rejoint la base d’AL ASHA et ont posé les bases de la RESCO AAir moderne.

Alors aujourd’hui j’ai beaucoup de mal a comprendre que l’on puisse confier à des étrangers aussi compétents soient-ils, le soin de récupérer nos équipages en détresse. Nous avons maintenant de réelles capacités de RESCO reconnues par nos alliés et ne pas prendre en compte au-dessus de la Syrie nos propres pilotes me choque… C’est pour moi une faute et si malheur devait nous arriver on trouvera encore des responsables mais toujours pas de coupables.

En cette fin d’année, j’ajouterai quelques mots. Les deux hélicos RESCO placés sur le PA Costa dans le golfe Persique trop loin de leurs zones d’action, viennent de rejoindre le pôle Resco de la coalition à terre.


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Vive la technocratie. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises, mais où est le choc de simplification ?

Sous l’impulsion du col Geille, l’AAir à crée les GIA, les Groupements d’Infanterie de l’Air précurseur de nos Commandos Parachutistes de l’AAir. Il s’agissait des GIA 601 et 602 dont les insignes avaient été homologué. En 1994, j’avais participé à l’attribution de l’insigne du 602 au CPA 10 nouvellement recréé contre la volonté des pleutres qui avalent peur de ressusciter l’esprit du putsch, on croit rêver !!!

Or à ma grande surprise j’ai constaté récemment que le N° 602 avait disparu de l’insigne du CPA 10.

La raison est « évidente » une norme impose de plus mettre de N° sur un insigne. C’est surement intelligent sauf que les insignes des nouvelles escadres sont (provisoirement au moins) caractérisées par le N° de la dite escadre !! Comprenne qui pourra.

Mieux encore je ne sais quel organisme technocratique a interdit de vendre un insigne d’unité sauf à passer par une structure officielle qui garantit fiscalement la légalité d’une telle transaction !!! Comme dans le paragraphe précédent une nouvelle norme a été édictée. Et le commissariat des armées a désobéi sciemment au Président de la République qui nous a annoncé un choc de simplification des normes !!!

Alors mes chers technocrates laissez-nous vivre l’amour de nos unités et des insignes qui témoignent des sacrifices des hommes et des femmes et allez faire vos contrôles dans les arcanes de vos bureaux. Nous serons peut-être payés sans Louvois, sans norme, mais efficacement.



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L'armée de l'air célèbre les 80 ans du parachutisme militaire

Les commandos de l'air sont les héritiers des premiers paras français... formés en URSS.

Avant-guerre, c’est au sein de la toute jeune Armée de l’air qu’est apparu le concept d’assaut vertical et a entrainé la création de deux Groupements d’Infanterie de l’Air, les 601ème et 602ème GIA. En effet en 1935 un traité d’assistance mutuelle est signé avec l’URSS. Le ministère de la guerre ne souhaitant pas que cette coopération soit marqué, confiât à l’AAir le soin de mettre en route un concept « farfelu » auquel personne ne croyait, le parachutisme militaire opérationnel. Une coopération militaire est engagée. C’est en effet des moniteurs soviétiques qui formeront les tous premiers paras français. Tous sont pilotes dans l’armée de l’air, sauf un officier du Génie plus aventureux que ses pairs.

A l’été 1935 une Ecole de Parachutiste est créé sur le terrain de Pujaut à coté d’Avignon et en 1937 l’AAir crée les deux Groupement d’Infanterie de l’Air le GIA 601 et le GIA 602 (dont je parle ci-dessus). Forts de 400 parachutistes les GIA sont beaucoup trop en avance pour qu’un concept d’emploi soit publié. Dans des manœuvres en 1937 les GIA parachutés dans des conditions difficiles s’emparent par un assaut vertical d’un PC de Division pourtant fort défendu. Malgré ce succès ou plutôt à cause de cette efficacité les biffins refusent de reconnaitre un mode de combat qui leur échappe et qui de plus n’était pas employé sous Napoléon !!! Aussi incroyable que cela paraisse les deux GIA ne seront pas utilisé pendant la drôle de guerre.

Après 1945 enfin éclairée par les actions des parachutistes US et Anglais, l’Armée de Terre annexe les deux formations de l’infanterie de l’air et sans vergogne créent les Régiments de parachutiste héritiers des GIA. 

L’Armée de l'Air recréera les Compagnies Parachutistes de l’Air pendant la guerre d’Algérie sous l’impulsion du général de Maricourt et les CPA 10, 20 et 30 sont les dignes héritiers de cette longue tradition de l’Armée de l'Air.





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ans le N° 52 de notre revue je vous ai parlé d’André Georges Lafitte. Je retranscrits in extenso ci-dessous le document.

André Georges a eu un accident d’ULM à Beaune fin septembre après 20 000 heures de vol il est mort aux commandes de son avion. Comme je le rappelle il a risqué 100 fois sa vie. Le destin l’attendait dans ce vol de routine. J’avais pour lui une grande affection et une admiration encore plus forte. Il nous quitté sans avoir reçu la Légion d’honneur, une injustice flagrante comme je le dis à la fin de cet article.

Bon vent André Georges tes amis valent mieux que les
«grands chandeliers de la légion d’Honneur»

qui affichent leurs hochets pas toujours mérités.

Connaissez-vous André-Georges Lafitte (AGL pour la suite du récit) ?

Pour ma part, je l’ai connu à Mekhnès ou nous étions à la même époque en Ecole De Chasse, puis en 1969.il sortait de la 11 et il arrivait au ½ Cigognes. C’était une personnalité très attachante mais parfois difficile à maîtriser.


En dehors de son métier de pilote de chasse qu'il assurait avec beaucoup de maîtrise, il adorait les rallyes automobiles. C'est ainsi qu'avec une Simca 1000 Sport il a fait quelques courses et tenté de monter aux arbres ce qui lui a valu une fracture des vertèbres!!! A cette époque, un pilote de BMW cherchait un navigateur pour l'accompagner dans ses courses et il n'en trouvait pas. Il faut dire qu'il y avait de bonnes raisons : le pilote en question portait des verres de 1 cm d'épaisseur et seul André-Georges a relevé le challenge.

Un jour au ½ il a décollé en M III E et il a eu, peu après le décollage, une panne sérieuse d'auto-commande. Il a pris suffisamment de G pour que sa fracture passée et les nouveaux dégâts occasionnés entraînent une inaptitude au siège éjectable. Ensuite, il a été affecté à Colorado Springs comme officier de liaison auprès de l'Ecole de l'Air américaine. A cette période, comme il ne faisait rien comme les autres, il chassait l'ours à l'arc dans les Rocheuses! Ensuite il a été affecté au 1er GMS puis il a reçu le commandement du 1er escadron de la DV de l'Ecole de l'Air avant de rejoindre Ramstein puis il a été affecté auprès de l’Ambassade de France en RFA et je l'ai perdu de vue.

Je l'ai retrouvé quand je commandais la FATac-1 RA; il est venu me voir un jour de juin 1990. Il m'avait fait part de son projet de traverser l'Atlantique en ULM; comme il avait un minimum de conscience du danger, il m'a demandé de lui prêter une combinaison étanche, au cas où.... Accord donné et je le vois début juillet où il me dit ne pas être prêt pour l'aventure, pour mille raisons dont je n'ai plus le souvenir. En vacances dans mon Sud-ouest natal, j'apprends fin juillet, qu'AGL était en route vers les Orcades pour sa traversée en ULM, puis aucune nouvelle... jusqu'au moment où il m’a téléphoné pour me dire qu'il était bloqué par les autorités Danoises et Islandaises à Reykjavik et qu’il avait besoin d’un coup de main. J'ai pu éclaircir la situation et lui permettre de poursuivre sa tentative.

Revenu à la FATac, je recontacte AGL et voici son débriefing.

« Je n'étais pas prêt pour la traversée quand un « Batave » m'a provoqué au téléphone. Il était aux Shetland pour tenter le grand saut. Il avait un projet identique au mien, il avait appris mon existence et il me narguait comme savent faire certains anglo-saxons. J'ai rassemblé mon matériel incomplet et en route pour rattraper l'insolent. Les anglais et les Danois n'avaient pas voulu que le Batave prenne l'air et il était en attente d'un feu vert aux îles Féroé ».

AGL entreprend de le rejoindre aux Féroé. Les deux concurrents sont bloqués par les autorités mais l’enthousiasme d’AGL et sa compétence d'ancien chasseur font la différence et il décolle enfin vers Reykjavik d’où il m’appelle. Puis les difficultés diplomatiques étant aplanies il peut enfin décoller vers le continent américain avec une escale au Groenland. Pour la petite histoire le Batave avait décollé des Féroé sans autorisation et il est resté en Islande ou il est peut-être encore !!!

Quelques heures après le décollage, son radio compas tombe en panne, la météo se dégrade brutalement et il est obligé de descendre au ras de la banquise. Quelques mois après ces moments, il m'a avoué avoir été impressionné par ces masses de glace en mouvement, prêtes à broyer l'imprudent.

Heures après heures, il avance vers le Groenland et à un moment, il voit une falaise devant lui. Il a encore de l'autonomie, il ne peut tenter la Nouvelle Ecosse car sans radio compas c'est une forme de suicide et il faut qu’il se ravitaille. Il commence donc sa quête vers son Graal (Kulusuk). Sachant que la ville et l'aérodrome sont au fond d'un fjord, il décide de tous les explorer d'abord vers le nord puis vers le sud.

Ces manœuvres ne sont pas sans risques dans l'atmosphère de brouillard de nuages et de neige mêlés. A un moment, il se trouve dans un crachin, sans visibilité et une falaise se dresse face à lui. Pied et manche dans le coin, il réussit à l'éviter.

Il rentre dans de nombreux fjords sans succès et finalement, au bout de son pétrole, il décide de se vomir dans un fond de torrent. Son ULM est équipé d'un parachute qui lui permet de se poser sur 20 mètres après une approche à faible vitesse et faible hauteur. Il se pose sans casse personnelle et déclenche sa balise de détresse. Quelques heures plus tard, un hélicoptère norvégien de la SAR se pose à proximité. Au débriefing, dans un des fjords explorés, il s'en est fallu d'un virage pour qu'il trouve son terrain de destination !!!

Voici pour la première traversée de l'Atlantique Est Ouest car il convient de se rappeler que le Groenland est réputé faire partie du continent américain.

A cette époque, AGL frôlait les 53 ans. Après cet exploit et à cet âge où la vie recèle encore de nombreux attraits, beaucoup auraient décidé de raccrocher les gants. AGL n'est pas de cet alliage. Toujours à la FATac 1ère RA, je le vois arriver pour me demander de lui prêter, à nouveau, une combinaison étanche. Son projet était de rallier Le Bourget lors du salon de l'aéronautique et de l'espace de 1991 après avoir décollé de Montréal, pour des raisons technico-financières (au lieu de New York).

Naturellement, je lui prête la combinaison ainsi qu'un paquetage de survie spécialement confectionné pour ce raid; mais entre-temps la FATac avait fait la guerre du Golfe 1 et j'avais acheté pour les Jaguar des GPS Garmin.

Pour la petite histoire, j'avais financé les 50 GPS sur les crédits du commissariat, considérant qu'il s'agissait d'équipements pilote comme la combinaison de vol ou les gants. C'est vrai qu'il y a là une interprétation extensive de la réglementation. Mais c'était passé et je n'imaginais pas que cela puisse poser problème. C'était sans compter sur le directeur (avec un petit d) du commissariat de l'Armée de l'Air, qui s'apercevant de cette « faute » comptable en 1992, soit près de 3 ans après, a demandé une régularisation des comptes au cas où un contrôleur des Armées lui demanderait des explications!!! Il en est des commissaires comme des autres hommes : il y a des hommes de stature (et Dieu sait si j’en connais) et il y a les autres.

Donc, je prête un GPS à AGL… avec une recommandation : interdiction absolue de se crasher pour ne pas perdre ce précieux équipement ce qui me dispensait de parler du pilote car je ne me serai pas risqué à donner des conseils de prudence à AGL !!!

Je lui laisse prendre le relais pour la suite de l'aventure :

«Décollage de Montréal sans PB particulier. Cap sur Le Bourget. Après 3 heures de vol je prends conscience d'une composante de vent de face rendant le Plan de Vol irréalisable. Rappelez-vous, pour ce salon cette année-là, il avait fait un temps épouvantable avec une succession de tempêtes venant du nord».

AGL doit prendre une décision. Entre le QRF (retour au point de départ) et poursuivre vers l'est je pense que la majorité d'entre nous aurait choisi la première solution. AGL décide de poursuivre et ce n'est pas une tempête nordique qui va le faire reculer. Mais comme il n'aura plus assez de pétrole pour rejoindre Le Bourget, il décide de se dérouter vers les Açores. Arrêtons-nous un instant sur une carte. Trois heures de vol depuis la côte, moins de mille kilomètres; 45° à droite les Açores ...4000 km devant et une dérive incroyable de 45° (le vent ayant la même vitesse que l'avion #100 kts). Il pianote sur le GPS et le voilà parti pour les Açores!!!

Rien de particulier sur ce trajet sauf la perte des infos du GPS pendant 20' (grosse frayeur), la traversée d'un système frontal complet avec un peu de givrage, un réservoir difficile à transférer et enfin une arrivée « sport ». Contact radio avec la base américaine ou il s'engage une conversation irréelle :

Contrôle de AGL : en provenance de Montréal, demande QFU et autorisation d'atterrir

Contrôle à AGL : Avez-vous une clearance pour venir chez nous? Si non, déroutement sur Lajès (terrain civil des Açores).

C'est ainsi qu'AGL a fait une heure de vol supplémentaire et s'est posé à Lajès

Après avoir fait le plein à Santa Maria, il est reparti à la tombée de la nuit et 8 heures de vol de nuit plus tard il est arrivé à Biarritz le lundi matin après la clôture du salon.

Voilà le récit de mémoire d'un témoin, donc sûrement imprécis et incomplet, des deux traversées de l'Atlantique en ULM par un officier pilote de chasse dont je suis heureux d'être un de ses amis.

Encore pour la petite histoire. Je suis même tenté de dire pour l’histoire misérable de la reconnaissance de l’Armée de l’Air : entre les 2 tentatives, pour ne pas perdre la main, AGL s’est attaqué à une série de records du monde et il a réussi à en rapporter 2 à la France (le 14 juillet 1990) dont un record mondial de distance et de vitesse en circuit fermé sur 1000 Kilomètres en pendulaire et un raid Dijon Covilha au Portugal. Et pourtant AGL n’est titulaire ni de la Légion d’Honneur ni de la Médaille de l’Aéronautique. Imaginez la Marine ne reconnaissant pas Tabarly...

Nous avons, pourtant eu un Grand Chandelier de la Légion d’Honneur qui a bien connu AGL comme commandant d’escadrille de la SPA 103 au ½ Cigognes en 1970 mais qui a « oublié «. Nous avons eu des CEMAA qui ont connus à leur poste les aventures d’AGL mais comme le grand chandelier ils ont tous oublié...


Le général Paloméros ancien de la 5, qui reçoit AP5 News, saura peut-être réparer cette injustice. »
Le général Palomeros n’a pas réparé l’injustice ! A la décharge du général Mercier que j’ai sollicité aussi sur ce dossier et qui lui, l’a pris en compte, je dois préciser que les critères d’attribution de la LH pour les militaires ont été durcis depuis trois ans, mais cela ne concerne naturellement pas les membres de certains cabinets ministériels qui ne sont pas soumis aux mêmes règles comme nous avons pu le constater au ministère du logement!!!





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En 1961 Le capitaine Claude BRUNET de l’escadron 2/5 arrive à Méchéria pour commander l’escadrille « du Petit Prince » succédant au Capitaine Le Coz. Lors de sa première mission opérationnelle il vit une expérience militaire et humaine exceptionnelle. Avec son autorisation nous publions le récit de ces moments intenses
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J'étais équipier d'une patrouille de 2 T-28 Fennec "Cagna vert" leadé par le Lieutenant Cunha. Le Lieutenant Ribot était mon observateur en place arrière. Notre armement était constitué de 4 mitrailleuses de 12.7, de paniers roquettes Sneb de 68 mm. et de roquettes lourdes T10. C'était une de mes premières missions de guerre de mon second tour opérationnel en Algérie. Nous avions décollé sur alerte de notre Base Aérienne de Méchéria en milieu de matinée pour repérer une bande de fellaghas qui, la veille, avaient pris un convoi de l'armée de terre en embuscade et intervenir en appui des troupes au sol. La bande rebelle avait été engagée par le Commando "Georges", commando de harkis, anciens fellaghas passés du côté Français. Arrivés sur zone, nous avons tout de suite repéré les rebelles. Après avoir pris contact avec le commando, nous avons effectué une passe de tir sur un groupe de fellaghas qui nous visaient et qui tiraient avec une mitrailleuse MG-42 calibre 7,92 mm. (Arme allemande très efficace). 

J'ai tiré une roquette sur ce groupe ; curieusement, je l'ai vue exploser à proximité du fellegha qui me visait (et le tuer) alors que, simultanément, une de ses balles de 7,92 mm atteignait mon avion, perforant le régulateur d'hélice. (Voir photo). Toute l'huile du moteur s'est échappée en quelques secondes par l'orifice de l'impact, couvrant mon pare-brise d'un film opaque d'huile qui m'empêchait de voir à l'extérieur. L'hélice est passée très vite au grand pas, le moteur a grippé et s'est arrêté. J'étais très bas, bien trop bas pour que mon observateur et moi puissions sauter en parachute.

Ne voyant rien, j'ai dû me crasher un peu au hasard, droit devant, dans la montagne au milieu des rochers et des touffes d'alfa, n'ayant le temps ni le réflexe de me débarrasser de mes roquettes, de couper les magnétos ou de fermer le robinet de carburant : toutes les conditions pour faire un beau feu d'artifice étaient réunies ! L'avion a heurté le sol brutalement. L'aile gauche a été arrachée, l'avion s'est mis sur le nez puis, miracle, est retombé sur le ventre. Un étrange et assourdissant silence a suivi le crash. Tout cela a dû durer une ou deux minutes?



Je suis descendu de mon avion emmenant les quarts radio, ma carabine US M1, mes cartes et documents et j'ai été me cacher derrière une touffe d'alfa à quelques mètres de l'épave car je voyais des musulmans courir vers moi à quelques centaine de mètres; mais j'étais incapable de savoir s'ils étaient des ennemis ou le commando Georges. Des ennemis, s'ils nous avaient capturés, nous auraient mutilés, malgré le laissez-passer (avec promesse de forte récompense en cas de remise aux autorités françaises) et le sauf conduit que chaque membre d'équipage avait sur lui.



J'ai alors réalisé que mon observateur était resté KO dans l'avion. J'ai été le chercher et nous nous sommes cachés à nouveau. "Cagna vert" leader tournait au-dessus de nous et maintenait les ennemis éventuels à distance. Mon observateur et moi l'avons béni !Les harkis du Sous-Lieutenant Riguet sont arrivés les premiers, et nous ont protégés des fellaghas qui venaient vers nous. Puis, très vite, un hélico-canon s'est posé à proximité et nous a emmenés vers une base de l'armée de terre voisine. Le lendemain, de retour sur ma Base Aérienne à Mechéria, je redécollais en T28.

Ai-je eu peur ? : non, sur le moment en tous cas. Car dans cette situation on n'a absolument pas le temps de penser; tout se déroule trop vite. Mais il faut reprendre de suite l'activité aérienne sans réfléchir, sinon... J'ai ensuite eu l'occasion de retrouver le Commandant Georges et les hommes du commando qui, en raison des liens qui s'étaient créés, m'ont souvent invité à participer à des opérations au sol avec eux. Mon arme était une carabine US M1. J'étais alors le seul Européen au milieu de 20 harkis. De sacrés gars, mangeant en tout et pour tout une boite de sardines dans la journée tout en effectuant plus de 50 kilomètres en 24 heures dans le djebel en pleine chaleur, avec tout leur équipement.

J'ai assisté bien sûr à leur passage dans les douars, et à leur façon d'opérer pour obtenir des renseignements ! C'est une autre affaire ! Leur chef, le Sous-Lieutenant Riguet (Algérien, ancien fellagha), un des 4 chefs de Katiba du commando Georges, est devenu mon ami. Après l'indépendance, il a fait le choix de rester en Algérie, croyant aux promesses de clémence du FLN, mais il a été capturé par les fellaghas et tué de façon atroce. Comme beaucoup de membres du commando Georges et de harkis de toutes unités. "Le Sous-Lieutenant Riguet sera trainé dans tous les Douars de la région de Marhoum, frappé, insulté. Puis il sera saigné, brulé, dépecé, ébouillanté. 21 de ses hommes qui l'avaient suivi vont assister à son martyr puis le suivre dans la mort". (Général R. Gaget, patron du commando Cobra)

Nous leur devons beaucoup. Ils ont mérité mieux que ce que nous leur avons donné en reconnaissance.

Claude BRUNET


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ROGER DELCAMP pilote au 3/5 à Méchéria

C’est à cette époque que j’ai rencontré Roger Delcamp. Il arrivait de la « 12 » affecté pour un an à Mécheria au 3/5. Il était CP et donc un peu plus âgé que moi. Nous nous sommes reconnus et entendus. Il m’a accompagné dans les épreuves de CSAL (Chef de Section de l’Aviation Légère). Après l’AFN il a été affecté à la 11, puis je l’ai perdu de vue. Grace à internet et aux anciens de la « 11 » j’ai retrouvé Roger et nous avons renoué notre amitié. Après la 11 il a suivi une carrière de pilote de ligne, avec la postale qui existait alors, puis Boeing  727, 737 équipage a deux  enfin , Airbus 300 et 310 et la fin de carrière 747-100/200:/300  

Il nous a quitté en Septembre, Bon vent Roger tes amis t’accompagnent.


JACQUES GERMAIN était officier mécanicien au 2/5 en 1960 il a vécu des moments intenses lors du crash d’un Mystère IV A à Solenzara

Nous avons perdu le 17 décembre Jacques Germain officier mécanicien au 2/5 en 1960 (promo 54 de l’école de l’Air). Il a quitté l’Armée de l'Air assez rapidement pour une carrière civile. Il a rejoint notre association il y a deux ans.

En 1960 il a vécu des moments très intenses. Fin septembre début octobre la « 5 » au grand complet (1/5 et 2/5 réunis) sont partis à Zara. Nous étions les premiers utilisateurs de cette base « OTAN » construite pour assurer les campagnes de tir des Belges et des Allemands. Ces derniers ne sont jamais venus préférant la Sardaigne !!!

Les installations de la base étaient à peine terminées et tout ne fonctionnait pas parfaitement. Nous étions sur Mystère IV A qui possédait une dispositif de secours de l’alimentation réacteur, "la sélection pompe". Un interrupteur permettait de mettre une pompe secours en Stand-By au cas où la principale avait une défaillance. Cette sélection pompe devait être coupée au-dessous de 10000 pieds car lors de la coupure au-dessus il se produisait un saut de pression carburant et le réacteur pouvait s’éteindre.

Le Cne Chaplot (dit la guêpe ) ancien du 2/5 avait été détaché aux OPS de la « 5 » pour épauler le chef des OPS dans ses responsabilités. Cette charge ne lui permettait pas de voler aussi souvent que les pilotes en escadron.

Ce 26 octobre 1960 le Cne Chaplot décolle face au nord pour une noria de tir air/air sur panneau. Passé 15000 pieds toujours cap au nord son réacteur s’éteint (l’enquête déterminera qu’il avait coupé la sélection pompe à cette altitude). Entre l’éjection et le retour sur base en planeur, Chaplot choisit la seconde solution et après un 180 degré il descend vers ZARA à la finesse max. Le pari était risqué et il a presque réussi car le M IV A a touché le sol train rentré sur la dalle d’entrée de piste face au sud. Chaplot avait perdu connaissance l’avion sur le ventre avait fait une cinquantaine de mètres et a commencé à bruler, les obus de 30 m/m explosant.

Quand la nouvelle de l’extinction de Chaplot est arrivée à l’escadron, le Cne J Germain a tout de suite compris la situation et il est parti avec un jeune sergent pilote, Claude Segard, en voiture vers de bout de piste nord. Ils sont arrivés sur les lieux du crash avant les pompiers. Sautant de la voiture Germain ouvre la verrière, debout sur le fuselage, débrêle Chaplot inanimé, le tire hors de l’avion et le confie aux secours. Naturellement pendant ce temps l’avion brulait les obus pétaradaient et le sergent Segard se rappelle qu’une des grandes craintes était qu’en extirpant Chaplot, le siège ne parte.

Voilà l’histoire de cet exploit de J Germain où se mêlent le courage, la générosité, l’anticipation et le don de soi.

Jacques Germain n’a pas eu la légion d’honneur ni une quelconque décoration pour ce haut fait, c’était peut-être « normal » à cette époque. Aujourd’hui ce serai règlementaire car les règles d’attribution de la légion d’honneur ont été durcies pour les militaires au profit des membres des cabinets ministériels.

Bulletin de liaison de l’Association des personnels de la « 5 » – N °71 – Décembre 2015


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