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Bulletin de l’association des
personnels de la « 5 »
Siège social : chez M. JC Lartigau, 58,
rue J. Ranquet 30150 Sauveterre
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New’s… N°89 contact |
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EDITORIAL
François Mitterrand
et Jacques Chirac ont, l’un accepté le droit de
retrait et l’autre en pire a fait inscrire le principe
de précaution dans la constitution. Alors revenons en
arrière, le Général de Gaulle aurait-il invoqué le
principe de précaution pour ne pas quitter Bordeaux et
refuser de partir en Angleterre pour redonner son
honneur à la France. Plus prosaïquement
mon ami Charles Flamand au sein du groupe Bretagne,
qui a combattu du Tchad à Strasbourg, aurait il fait
jouer son droit de retrait. Voici quelques phrases
tirées de ses mémoires Souffrances
au quotidien dues à l’inconfort prolongé, à
l’isolement dans un environnement hostile. Des
services d’assistance inexistants, un matériel
inadapté, un armement trop léger pour la mission
exigée, dans un éternel combat. Chaque mission se
situait à la limite des possibilités, l’autonomie
des avions constituait un sérieux handicap et des
conditions MTO limites. Chaque mission comportait de
grands risques. Pendant
cette crise du Coronavirus, le personnel soignant et
de nombreux autres sont en première ligne sans
protection avec des risques avérés, et dans d’autres
professions, beaucoup moins exposées, certains font
jouer le droit de retrait !!!0 Aujourd’hui la lâcheté se cache derrière le principe de précaution et le droit de retrait. Quand aura-t-on un patron, un chef d’état, capable de remettre les pendules à l’heure ? SOMMAIRE: |
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#SOMMAIRE
Jean
Marie Saget nous a quittés. De la promotion 49 de Ecole de
l’Air il a été affecté au 3/2 sur Ouragan. Il s’est fait
remarquer lors de la course Paris Cannes qu’il a gagné. Il
m’avait dit que ses mécanos avaient poli le fuselage pour
réduire au mieux la trainée et qu’il avait recalculé les
courbes de performances pour prendre une vitesse de montée
la plus adaptée à la distance et à l’altitude choisie. Après
cet exploit, il avait rejoint les avions Marcel Dassault et
il était devenu le pilote d’essais majeur du constructeur.
Il avait volé sur tous les protos et depuis sa retraite il
continuait à voler «en famille». Plus de 20000 heures de
vol !!! Chacun reconnaitra sa simplicité, ce sens de
l’amitié et ses compétences aériennes et humaines
Avant
de parler de Jean André Bourdilla, un grand ancien que nous
respectons tous, je ne peux pas m’empêcher de revenir sur la
vaine gesticulation de la Marine et de ses fleurons.
Un scoop,
le PA CKT (pour cocktail) est en panne
de manifestations.
Figurez-vous
qu’après deux semaines à bonne distance des théâtres d’opération
de Syrie, ou sans risque, il a marqué de son empreinte les ronds
dans la mer jolie, le PA CKT a fait une escale à Malte en
méditerranée pour se remettre de la « tension
opérationnelle ». Puis en route vers l’atlantique pour de
grandes manœuvres avec les américains le PA CKT devait faire une
escale à Brest pour marquer par des festivités mémorables son
retour dans le port breton après 10 ans d’absence.
Et
patratas, alors que le bagad de Lann-Bihoué était réservé, les
petits fours préparés et le champagne au frais, le méchant
Corona Virus est venu perturber le retour triomphant de
l’intermittent de la défense. Les brestois, les invités VIP et
autres ne pourrons pas témoigner des qualités d’hôtes du pacha.
Les temps sont vraiment très durs et le PA CKT devra repartir
vers des missions pour lesquelles il a été conçu, abandonnant
cette mission de représentation pour laquelle il est
principalement utilisé. A propos il est équipé, dit-on d’un
hôpital ultra moderne. Alors pourquoi fait-il des ronds dans
l’eau alors que toute la nation est mobilisée ? Mystère, il
vaut mieux demander au chef d’état-major particulier du
président. C’est un marin il doit savoir.
Mieux,
nous avons assisté à une opération médiatique autour du Porte
Hélicoptère Amphibie «Tonnerre » qui a transporté 10 corses
victimes du corona virus vers le continent, il y a quelques
jours. Ce bâtiment est un «sister ship», comme on dit dans la
marine, du Dixmude et du Mistral. Quand ces bâtiments ont été
admis au service, nous avons entendus qu’ils étaient capables de
tout et, qui plus est, ils possédaient un Hôpital de 69
lits (extension possible) et de deux 2 blocs opératoires,
« véritable hôpital embarqué permettant de faire face à une
crise sanitaire de grande envergure » comme le précisent
les communicants de la marine. En revanche, pour l’heure, il
n’est pas question de transformer les Mistral et Dixmude en
hôpitaux flottants, ni pour l’accueil de malades du Covid-19, ni
pour soulager les infrastructures médicales terrestres en
recevant des patients atteints d’autres pathologies.
Alors ou
sont-ils ? J’ai appris récemment que le Mistral distrait de
la villégiature du tour du monde avec la mission Jeanne d’Arc,
allait faire de la logistique autour de La Réunion, mais qu’il
n’aurait pas de rôle médical. Les habitants de Mayotte ne sont
pas certains d’avoir compris.
Le Dixmude
irait dans la mer des Antilles pour une mission de logistique,
mais le 3 avril il se ravitaillait toujours en tomates et en
baguettes à Toulon !!!
Ou est leur
valeur ajoutée dans le drame que nous vivons pendant que la
France entière est mobilisée. Comme souvent la Marine ne sait
pas faire quand on la met au pied du mur.
#SOMMAIRE
Le Colonel Bourdilla de la promotion 44 AFN de l’Ecole de
l’Air à rejoint le paradis des pilotes perdus le 26 mars. Ce
numéro de notre revue lui est consacré. Ancien commandant du
1/5 forte personnalité, il avait pour son escadron une
grande reconnaissance et une certaine faiblesse, fruits des
moments qu’il avait vécus dans cette unité. Il nous a
raconté ses années dans l’Armée de l'Air. On retrouvera ici
quelques-uns de ses souvenirs. Nous saluons avec affection
ce grand ancien, au passé opérationnel remarquable et à la
plume légère. J’espère que vous aurez des pensées pour lui
avec l’admiration des anciens de la « 5 » et le
plaisir de reconnaitre « qu’il est des nôtres »
Prologue
Voici quelques
jours déjà, revêtu de ma veste civile de retraité, je m’en fus
visiter le CEAM sur la Base de Mont de Marsan. Il s’agissait
d’une agréable visite touristique et rien ne devait tellement me
surprendre ! Las, dois-je l’avouer, j’en suis sorti
positivement bouleversé. En quelques six heures de temps
(entrecoupées d’un excellent repas) j’ai été confronté à
l’aboutissement de ce qui représente la révolution de notre Mère
l’Armée de l'Air, faisant face à la numérisation généralisée de
tous ses moyens. Le Contrôle, la Formation et pour terminer, le
Rafale ! J’ai été emporté par un véritable maelström qui a
fait resurgir en moi tout ce à quoi j’avais participé pendant
plus de trente années, comme petit acteur, patron, concepteur,
créateur. Et, tout cela, prolongé par la suite par un assez long
passage dans le milieu industriel. Les souvenirs ont
littéralement explosé. L’un de mes admirateurs m’ayant demandé
de l’écrire… J’ai succombé !
-"La Chasse"Le pain blanc. -Le 1/5 Vendée. -La coupe Comète. -Le Mistral (l’avion pas le vent). -Leçon de commandement. -La DAT (Défense Aérienne du Territoire) Le pain gris. -Le CATAC (Commandement aérien tactique) La croûte. -Trois anecdotes, Les Banshees. "Le Tumble". 55000 pieds ou encore un tour deuk!
"La
Chasse"
Le pain
blanc
Tout avait
débuté en 1946, je rentrais des States, tout juste breveté
pilote et à peine lâché sur P47 Thunderbolt. Mais, j’étais un
fighter pilot ! (enfin, je le croyais). Je me suis retrouvé
devant un héros du Normandie-Niemen qui m’a douché d’un "vous ne
savez rien… On va vous apprendre LA Chasse". Et le hard labour
avait commencé. Il a duré quelques trente années pendant
lesquelles j’ai positivement mangé tout le pain blanc de ce
métier mythique ! D’accord, j’ai joui d’une chance
insolente, mais j’ai touché à tout, j’ai fait toutes les
bêtises, je suis devenu un pilote… vieux, j’ai même pu ramener
au sol toutes mes montures (à peu près intactes) et je suis
encore là pour le raconter en utilisant un ordinateur et un
traitement de texte.
Oublions
Meknès, où l’on se tuait allègrement en chevauchant tous les
engins qui, eux, avaient survécu à la guerre. Je me suis
retrouvé en Escadre sur Spit. On vivait, on respirait, on jouait
" Chasseurs mes frères " en vrai. J’étais le 1er
sous-bite AD arrivé en Escadre après la guerre. Je côtoyais les
Dieux de l’Olympe chasseresse, les Jeandet, Madon, Hugo… J’y ai
appris mon métier sous la conduite de chefs prestigieux, Ludo
(Berthet), Muso (Muselli, l’équipier de Marin la Meslée). L’œil
de lynx de Boillot nous ridiculisait. Le monde se partageait
entre les CP et les équipiers. Ceux-ci ne savaient rien, les
autres savaient tout (sauf le VSV ! Car pour ça, nozôtres
les "made in Usa" on gardait l’avantage !) Un équipier ne
pouvait pas aller se poser seul sur un autre terrain, mais sitôt
mon brevet obtenu, et parce que j’étais lâché P47, je suis parti
chercher six avions (avec 5 équipiers) à Ambérieu pour leur
faire passer la mer Méditerranée. Ayant tout ramené (les six
pièges) à bon port, j’ai renouvelé l’opération jusqu’à compléter
la dotation du Groupe (on partait le dimanche en JU52 Mn Blanche
– Francazal et on rentrait le vendredi en P47). Pour montrer que
nous avions les jambes longues, nous sommes même allés jusqu’à
Abidjan en 7h40 de vol sans escale ! Au retour, comme on ne
savait à peu près rien des courants d’air contraires, nous avons
dû nous poser à Tindouf, à six, accrochés à un Léo45, lequel
avait percé sous 500’ en variation de QDM. La belle époque que
ce fût, le matin à 20 000’, l’après-midi à –10 mètres (pour
courser le mérou), et puis j’étais devenu Cdt d’Escadrille.
J’avais appris la mystique du CP 1er de cordée et
j’avais compris la symbiose qui unissait les cochers et leurs
graisseurs !
Le 1/5 Vendée
Il y eut alors
une 1ère révolution, nous sommes passés sur jet, les
Vampires. J’étais devenu chef ops au CTAR d’Orange. C’est
ensuite que les choses sérieuses ont vraiment commencé. Toujours
à Orange, promu Capitaine le 01.01.1954 je suis devenu, trois
mois plus tard, Cdt de l’Escadron "de Chasse" 1/5 Vendée = 45
pilotes dont 5 CP (les s/CP n’existaient pas) plus une vingtaine
de mécanos exceptionnels, drivés par l’Adjt Berthelot à qui
devait succéder le grand Pagès. C’était un escadron appartenant
à la DAT. Ma prise de commandement fut positivement
homérique ; tout jeune Capitaine et petit chef, j’étais là
depuis moins d’un mois lorsque nous sommes partis en manœuvres à
Hyères. Nous hébergions une patrouille de Vampires Italiens
(légèrement différents des nôtres, juste pour faciliter !
et on se causait en anglais). Décollage sur alerte en
patrouilles de quatre (dont un italien). Plafond 800’, Montée à
20 000’ no joy ! Retour à la maison ! Un trou sur
Toulon, je plonge avec mes trois fidèles et on remonte la côte
en radada avec l’idée de contourner Giens par la mer (N°2 en
panne radio) ! 10’ plus tard, la pluie, plafond zéro. On
remonte à 10 000’, toujours à 4 avions ! "Hyères Approche"
nous accroche et on plonge dans la couche… Lorsque mon N° 3
décroche ! Je remonte (pour pas le laisser seul), on
rassemble, encore à 4, hippodrome et on repart (avec le pétrole
qui commençait à…) ! On rentre dans la couche lorsque 3 et
4 (l’italien) redécrochent ! "OK remontez ! Moi je
perce à deux ! Sous la couche, silence pour moi" (Et je me
pose !) En suivant à la radio le sort de mes deux autres...
ceux qui s’étaient perdus… puis aperçus… et dont le N° 3
traduisait en anglais les caps pour le pauvre italien ! Je mets le pied
par terre juste pour voir N°3 qui se jette sur la piste tandis
que le 4, lequel perçant en snake, avait over shooté, faisait
demi-tour et se posait à contre piste ! Ils se sont
croisés, à mi-bande, sans pépin, sous les yeux du Cdt d’Escadre
(Fabry) qui m’a seulement dit "que j’avais du pôt ! "
Mon second, pour me consoler, me dit alors « C’est bien connu,
D… (le N° 3) refuse toujours de percer en patrouille".
C’était ça la
DAT de l’époque ! On monte, on ne voit rien, on
rentre !
La coupe
Comète
Un peu de
temps se passe et nous partons (11.06.54) défendre la Coupe
Comète brillamment remportée l’année d’avant par mon
prédécesseur (Robveille). Mise en place à Dijon, nav à 12 et,
fort heureusement, mon second me réveille alors que j’over-passe
le 1er point tournant ! (Le stress). On se pose
à Cazaux, mes champions tirent comme des chefs (Gourlia et
Camus, c’est lui qui expliquait à tout un chacun, dont le Cdt du
CIT**, "que le collimateur gyroscopique ne poussait pas sous les
arbres et ne se cultivait pas comme les pommes de terre" – il
marquait assez régulièrement 75 et même 80% sur les cibles),
Monsieur Maurice (ex patrouille d’Etampes) gagne l’épreuve de
voltige dans une démonstration éblouissante et nous remportons
la coupe ! Le défilé du retour à 12 mérite d’être raconté
mais personne ne voudra me croire ! Passage par Lourdes
pour dire merci ! Défilé à 300’ sur Laloubère (j’avais
promis à mon Père que si nous gagnions !) Toujours du
pot ! Y avait un *** biffin qui fêtait son départ et qui
s’est cru obligé de remercier le Cdt de la 3ème RA
"pour cette aimable attention" (J’ai dit du pot, car personne
n’a su nous identifier = pas vu pas pris !). Pour la bonne
mesure, je me suis même détaché du dispositif pour aller
survoler, vite fait, mon collège natal (chaque fois que j’y
vais, y en a qui en parlent encore!). Le survol d’Orange à
l’arrivée vaudrait sûrement (aujourd’hui) une radiation du
PN ! J’ajouterai que l’alcotest n’existait fort
heureusement pas à l’époque : d’abord, il avait fallu vider
la coupe (fort aimablement remplie par les perdants avec tous
les alcools qui traînaient sur la table) et puis, après, nous
étions allés réveiller la mécanique pour les associer
correctement au succès de l’Escadron ! Le voyage s’était
fait bien évidemment en VFR.
Consultant mes
archives, je note sur mes tablettes que le 01.07.54 je me suis
vu décerné un "Diplôme Technique de Spécialité-Aviation de
Chasse et Reconnaissance". J’avais complètement oublié ce
détail. J’avais l’honneur de figurer sur la même liste de
distinction que mon Comandant d’Escadre (Fabry… la ligne en
dessous, bien sûr !). Je ne crois pas que cela figure dans
mes notes ; en tous les cas je n'ai jamais bénéficié d'une prime
spéciale.
Au
cours
de l’hiver suivant, dans notre malheureuse Fillod,*** nous avons
eu à rédiger un "devoir d’hiver" (je crois que j’en possède
encore une copie dans le fond d’une cantine). Si mes souvenirs
sont exacts, cela devait exposer le déploiement d’un Escadron
sur un terrain de campagne ! Le rédiger, noble tâche qui
n’intéressait que le Chef (moi) et son second (piteur R), cela
ne fût pas trop compliqué, mais fallait taper à la machine, avec
deux doigts, sur la bécane de l’Escadron dont les caractères
avait tendance à s’envoler. Ké supplice ! Les carbones, les
pelures, les croquis sur stencil… vous n’avez pas idée de ce que
nous avons enduré pour un bidule qui ne servait à rien et à
personne. Nous avons bien reçu le satisfecit qui convenait mais
je me rappelle aussi que sa forme tactique avait fait sourire
quelques experts en protections au sol qui avaient eu le
privilège de le parcourir (discrètement). Un artilleur et un
fantassin, lesquels avaient, sans aucune ambiguïté, émis des
doutes sur nos compétences militaires. Notre modestie naturelle
en avait pris un coup :"vraiment, pour eux, ces aviateurs
étaient de véritables têtes en l’air qui ne comprenaient pas
grand-chose aux défilements et aux croisements de feux" !
Quoi qu’il en soit…l’ordre nous avait été donné de… et nous
l’avions fait ! Le clan des équipiers nous regardait
souffrir et poussait le petit au bout (tarot) en se gaussant de
nous ! Cela a du bien nous prendre près de trois mois de
l’hiver 54 pendant que le mistral-vent soufflait sur les
lavandes.
**NDLR CIT
Centre d’Instruction au Tir dont Boillot, déjà cité, à été un
patron mythique très respecté.
*** NDLR Les
Fillod étaient des bâtiments préfabriqués rapatriés d’Indochine,
qui ont abrité les escadrons jusqu’en 1970 environ. Ils
n’étaient pas chauffés, ou si peu, les fenêtres n’étaient pas
étanches mais on y était merveilleusement bien et on y a fait
des fêtes mémorables
#Souvenirs..souvenirs
Le Mistral (l’avion pas le vent)
A quelque
temps de là, nous passons sur Mistral, l’avion, et je commence à
être moins mauvais. Je suis devenu le chef d’une bande de
copains ! On vole à tour de bras, on forme les jeunes, on
tire, on intercepte, on part en manœuvres ; un coup de
sifflet et, dans les six heures qui suivent, 16 avions giclent
aux quatre coins du pays avec 2 N 2500 transportant le matériel
et les mécanos. La belle équipe que je possédais là ! Avec
nos Mistral nous étions les meilleurs et ne doutions de
rien : je me rappelle une interception par Immelmann à 35
000’ ! D’accord, arrivés en haut on s’effondrait, mais la
photo était dans la boîte. On bananait même les Sabres (F86)
américains avec nos avions fantômes. Barrage-Barricade,
campagnes de tir à Cazaux et à Oran, Sextius, on était tout le
temps dehors et les CP faisaient jusqu’à 25h00 par mois !
(J’ai personnellement fait 6 sorties en un jour au cours d’une
manœuvre Parasol). Alerte en bout de piste, cap, altitude,
fréquence et un mystérieux contrôleur était supposé nous mener à
l’hostile ; fallait le chercher, le voir, lui courir sus et le
tirer ! On en trouvait toujours un ! (pas
nécessairement celui qui était prévu au décollage). Le "short
pétrole" n’avait pas de secret pour nous. J’ai eu du pôt… On est
toujours rentrés (tous).
J’ai alors
dégusté une très large tranche de mon pain blanc, l’ambiance de
l’Escadron était sublime, nous avions appris à négliger
totalement le vent de travers, l’avion était merveilleux, pensez
donc, roulette retombée, badin nul, une rafale… et vous vous
retrouviez en vol, il suffisait de ne pas le contrarier et tout
se passait bien. A bord de cet oiseau, je suis monté à 55 000’
(mon top record personnel). La haut j’ai trouvé… compressibilité
+ décrochage (il n’a même pas éteint, mais on s’est avachis à 30
000’) ! Pour montrer que je faisais plus et mieux que les
Ouragagnasses, (un jour de course Paris-Cannes), je me suis mis
en compressibilité à 1m du sol sur la piste de Nice !
J’avais du pôt (comme dab), c’est passé sans toucher. Oui,
vraiment un piège exceptionnel ! Il n’avait que deux
défauts : son Mach 0,78 (0.72 avec les bidons) et les
petits tubes en verre (ça cassait souvent) qui branchaient les
susdits bidons. Les poursuites à 2, 4 ou six avions… entre les
tours cumuliformes, plongeant dans les trous, traversant les
tunnels… Quelle jouissance !
J'allais quand
même oublier de conter l'un de ces petits incidents qui donnent
à penser et forment le jugement d'un Patron de 30 ans (lequel
croit tout savoir puisque c'est lui le Chef !). C'était en
Octobre de l'année 54, volant à la tête de mon Escadron, je m'en
étais revenu à Oran pour y faire une campagne de tir. Je me
revois, admirant la ligne de mes Mistral, lesquels, coïncidence
amusante, occupaient la place qui avait été celle des Spitfires
de ma jeunesse (47/50). Un mécano vint en courant, "Mon
Capitaine, Mon Capitaine? Venez voir!" Il m'avait amené près
d'un des derniers pièges, lequel était tout proche d'un chantier
occupé par des travailleurs locaux (un peu bronzés, si vous
voyez). "Regardez ", qu'il m'a dit en me montrant une grosse
masse au manche court, laquelle reposait mollement dans le
logement du train droit. Mon sang ne fit qu'un tour : sabotage !
Un tel outil ne pouvait provenir que du chantier voisin, là où
l'on cassait des pierres. Saisissant l'objet avec un mouchoir
(les empreintes ?), nous sommes revenus à mon bureau pour y
tenir conseil. Pas de doutes, fallait saisir La Sécurité Base !
Ce qui fut fait. Un moustachu rappliqua sur le champ. Fort
heureusement il ne saisit pas le corps du délit et s'en fut tout
d'abord consulter. L'affaire était délicate et mettait en cause
une unité de passage. Les langues allaient bon train lorsque le
chef de Piste, enfin mis au courant, examina la Bête. "M….ky
fit! Regardez ce N° gravé sur le manche. On dirait quasiment un
outil de chez nous ! Peut-on poser la question à Orange ?"
Message ou téléphone, je ne sais plus, mais la réponse revint,
manifestement positive, la masse venait bien de chez nous et le
responsable était identifié (son nom et le n° de consignation de
l'outil.!)
C'était en
changeant la roue, dans l'urgence au départ de Caritat. Trois
bidasses, ou aides disponibles, pour soulever le plan et il
fallait un objet lourd pour positionner, vite fait, la roue sur
son axe avant de laisser retomber le plan. Une autre tâche
urgente à régler, la masse que l'on pose au-dessus de la tête,
pour aller plus vite… et que l'on oublie ! Et tout se trouvait
expliqué ! Oui, d'accord, mais ça c'était du linge sale que l'on
devait nettoyer en famille, ça ne regardait sûrement pas les
chaussettes à clous ! Et encore moins la Srass et/ou la Sécurité
des Vols (laquelle n'existait pas encore !). Comprendre que le
convoyage de l'avion s'était effectué sans histoire avec un
passager clandestin par la faute d'un étourdi et par la grâce du
coup de pôt, c'était facile mais expliquer au barbousier du coin
qu'il avait été dérangé pour rien… ce fut plus compliqué et il
fallut dépenser beaucoup de salive avec sans doute un peu
d'anisette, pour enterrer l'affaire. Qu'importe, c'est comme
cela que l'on acquiert le calme des vieilles troupes, la
sérénité et la sagesse et aussi la confiance affectueuse de ses
subordonnés. En bref, l'expérience du Commandement
Le
Ronéo ayant fixé mon sort, je suis allé me présenter au 3ème
guichet du Boulevard Victor (Enfin, à son chef !) Un avion
lisse, VFR, 20 000’ direct, Orange – Villacoublay, pas de
pb ! Las, au retour, le temps s’était gâté, la protection
météo ne montrait que des chaînes de cunimb. Quand je me suis
pointé au CLA, pour déposer mon plan de vol, le chef a émis la
prétention de me refuser le VFR ! Or, approche + contrôle,
direct, ça passait pas ! Je l’ai traîné dehors, lui ai
montré un gros trou dans le système nuageux et je lui ai promis
que j’allais monter dedans (dans le trou), jusqu'au-dessus et
que, avec mon Mistral, ça ne posait aucun problème ! Il m’a
cru et, admiratif, m’a délivré ma clearance ! Mise en route
fissah.et marche la route ! Pas plutôt décollé, of course,
cap direct et monte là-haut ! J’étais en contact avec
l’approche qui ne voulait pas en croire ses oreilles "Zêtes sûr
d’être en ciel clair ? Affirmatif, passant
7 000’ !" (J’étais de fait en pleine bordure d’un
cunimb et me faisais secouer comme une vulgaire salade)
"Curieux, ki me répond, ya une Caravelle dans, votre secteur qui
se trouve très mal à son aise ! Non, non je passe
15 000, toujours ciel clair " (Je pouvais à peine
parler, tellement j’étais secoué !) "OK, 21 000, je suis
au-dessus (ça c’était vrai !) je quitte votre fréquence" et
je suis rentré sans histoire ! Personne ne pouvait me voir
à l’époque, les radars étaient plus ou moins borgnes… pas vu,
pas pris… C’était le bon temps !
La DAT (Défense Aérienne du Territoire)
Le pain
gris
Les meilleures
choses ayant une fin, je me retrouve donc "Commandant de la DAT
à l’EMAA-3". Ce n’est pas moi qui le dis, c’était le colonel
Clausse (le "Patron" de Chasseurs mes Frères) qui éructait
littéralement : "La DAT, sise aux Petites écuries de
Versailles, commandée par un Général **** (Chassin) , secondé
par un Général ** (Menu), assisté par un Colonel généralisable
(lui) est, de fait, commandée par un trio qui a pour noms :
(quoiqui) Lansoy, chargé de mission auprès du S/C–Ops de l’EMAA,
Vauchy du BEG et Ca- pi-taine Bourdila (et on peut dire que tout
le mépris du monde traînait sur ce dernier nom !). La DAT
(Défense Aérienne du Territoire) pour moi, ce n’était jusque-là
qu’un CTR/CDC avec des contrôleurs, dont il fallait toujours se
méfier et voilà que je découvrais un monde mystérieux avec des
stations aux couvertures incertaines, des moyens à déployer, des
transmissions, des réseaux de Commandement et surtout beaucoup
de paille à rédiger. Comparé au pain blanc le régime s’était
bien transformé ! Notez bien que, lorsque l’on était arrivé
à maîtriser le monstrueux système et à savoir naviguer dans ses
corridors interminables, on pouvait goûter quelques joies,
disons élémentaires.
Remarquez, il
y avait bien quelques compensations : déplacements ‘a piacere‘ (droit de
cuissage ouvert sur les N1100 du GAEL pour aller sur place),
abonnement à la 10ème EC, le 28.06.56 je me suis
lâché sur Mystère II (mach 0.9). Toujours pareil à
l’époque : il n’y avait pas de biplaces, un briefing
détaillé, la doc et… vole la galère ! Un avion très étroit
(comme son train), je découvrais en même temps les commandes
hydrauliques, les bras se trouvaient littéralement enserrés par
le cockpit. "Vous allez voir au 1er décollage vous allez
battre des plans". Je n’ai pas battu des plans... j’avais une
réputation à défendre ! mais j’ai eu d’énormes bleus sur
les triceps, le temps de comprendre qu’il fallait laisser
l’engin se débrouiller tout seul. Le 06.07.56, enfin, je suis
entré dans le cercle encore assez fermé des pilotes <<Mac
1>>. Le jeu consistait à se hisser à 43 000’ (assez
long), puis à planter un retournement vertical en surveillant
l’aiguille. Aucune sensation ! Heureusement ce jour-là, il
y avait une délégation étrangère qui attendait ma démo depuis la
tour. Le contrôleur avec qui j’étais en liaison radio a tendu
son micro et j’ai entendu "mon" <<((Bang))>>. Il
parait qu’il était assez beau, (ça ne marchait pas à tous les
coups).
Dès le début
de ce "hard labor" j’avais du apprendre les beautés ineffables
de "la fiche" et des "accords". Le sujet importait peu, vous
receviez une commande et il vous fallait pondre, une ou deux
pages "documentées". La fin du fin consistait alors à placer le
fruit de vos cogitations dans une petite chemise 21X27, laquelle
se repliait sur votre œuvre, et organiser dans des cases ad hoc
un périple de consultation au travers des Bureaux qui pouvaient
avoir un avis. L’urgence pouvait vous demander d’aller porter
physiquement l’objet à qui de droit, sinon, celui-ci vous
revenait "au bout d’un certain temps". Ce pouvait être aussi une
bonne méthode pour enterrer un problème difficile à traiter (je
n’ai eu recours qu’une seule fois à ce subterfuge inavouable dix
mois après j’étais parti. et la bête n’avait toujours pas refait
surface, il s’agissait du statut des chasseurs de nuit ! =
Z’avaient ka voler de jour comme tout le monde !).
Notez bien
qu’une belle fiche pouvait vous doter d’une réputation d’expert
incontournable. Sommé de faire le point sur "la Guerre
électronique", (la G.E. de l'époque) j’avais concocté trois
pages sur des sigles du type CME. Il s’agissait d’un tableau à
double entrée proposant "mes" définitions personnelles de CME =
Contre Mesures Electroniques ; CCME = Contre-Contre, etc... et
le reste à l’avenant. J’ai complètement oublié la suite, mais
c’était devenu un dictionnaire très officiel. et qui faisait
autorité! Personne n’y connaissait rien et au royaume des
aveugles, etc... ! Expert reconnu, j’étais même appelé en
consultation. Da verro,
acarbi, je jure que c’est vrai !
Mais, soyons
sérieux, Il y avait aussi des choses plus graves, la
guerre ! Celle de Suez par exemple. Vues mes compétences
étendues, j’avais été classé "terrapin" (nous étions quinze
habilités au total dans tout l’Etat-Major, c’est vous dire). Ce
jour-là (enfin ce soir-là), "Nous" recevons un message Flash,
venant de Chypre et signé du "big chief" en personne !
C’était la 1èrefois que je voyais un Flash (la seule
fois pour tout dire, dans toute ma carrière). J’ai complètement
oublié l’objet et le sujet. Je fonce, je fais décider qui de
droit, je rédige, et je porte le parapheur au "signeur"
responsable. Assez content de moi. Je n’avais pas mis une heure
entière ! Et que croyez-vous qui se passât ? Je vois
et j’entends encore ; il (le "signeur" responsable de
service) redresse ses grosses lunettes d’écaille, ouvre le
tiroir droit de son bureau et y enferme le parapheur !
"Mais, mon Colonel, c’est un flash ! Ecoutez–moi bien mon
jeune ami ! De deux choses l’une, ou c’est aussi urgent que
vous dites et là-bas ils ont dû décider quelque chose ! Et
vous ne pouvez que les gêner ! Ou, ce n’est pas aussi
urgent que cela et la chose peut attendre jusqu’à demain
matin ! Dans les deux cas = Tiroir ! " . Le
lendemain, les faits lui ont donné raison. Puissance de la
sagesse et de l’expérience.
Il y a
d’autres secrets moins avouables, que l’on pouvait découvrir
dans ce centre nerveux de gestation et de décision où l’on
voyait passer tout ce qui faisait la vie de L’Armée de l'Air. Un
de mes conseillers en sa sagesse a décidé qu’il fallait
censurer ; je respecterai donc son avis et ne m’étendrai
pas davantage. Bref, mon temps étant passé, j’ai fait jouer mon
Joker et choisi une affectation de qualité loin de la DAT !
La chasse lourde, stratégique, le Strike en Allemagne !
L’un de mes anciens chefs, déjà sur place, (Léon, qui commandait la
4 à Bremgarten) m’avait utilement conseillé : ya plus de
pain blanc, zont tout bouffé, mais y reste la croûte et,
croyez-moi, elle est encore épaisse ! C’est ainsi que je me
suis retrouvé désigné Chef –Ops, à la 4, sur 84 F, Thunderstreak,
transsonique, le plus beau Piège du moment.
Charl’s, mon
ancien (et ami), qui gérait mes affaires au sein de la DPMA
m’avait délivré mon tiquet gagnant = chef-Ops. avec voie
montante à l’issue : "Normal, t’as payé, t’as gagné… c’est
la règle ! . Il avait cependant assorti son cadeau
d’une solide mise en garde : Fais gaffe en arrivant, c’est
le "Charme" qui commande la demi-brigade ! Vers j +10 il
viendra te tester. Si tu patines, t’es f…, il t’écrasera du
talon. Si tu rigoles, il daignera sourire et tu vivras des jours
heureux ! Good
luck !
Le CATAC (Commandement aérien tactique)
La croûte
Dès mon
arrivée à Brem, j’ai pu effectivement constater que je pénétrais
dans un monde nouveau. Les locaux, la Mercedes de service, le
bureau… tout était neuf et beau (pas la voiture quand
même) ! A peine le temps de faire quelques tours sur l’un
des derniers Ouragan encore présent sur la Base (pas de doute le
Mistral… c’était autre chose !) et j’ai dû affronter «la
bête» le 84 F, Thunderstreak.
Ça aussi c’était autre chose, c’était lourd, c’était gros, on
avait de la place et un plein "booklet" de procédures normales
et de secours. Bof, ça volait vite et loin ; en bout de
piste, fallait sauter la barrière ; au retour fallait
sortir le parachute de queue et poser les pieds par terre
(autrement un coup de frein réflexe vous éclatait un pneu sans
coup férir). Mais finalement on s’y habituait assez vite et
puis… y avait tous ces moyens radios qui vous facilitaient bien
la vie (rendez-vous compte : suffisait de sortir ses gant
et le barillet des fréquences pour pouvoir afficher manuellement
les plots d’une valeur non inscrite dans les 24 programmes
enregistrés ; puis remettre le total en place sans tordre
les barrettes ! Le pied dans les nuages si on savait
récupérer les chiffres ad hoc ! Mais on "pouvait" le
faire !)
Bref, le Gio**
ayant enfin accepté de partir, j’ai pris officiellement mes
fonctions ! Et quelques jours plus tard Rebecca*** m’a
servi de réveil ! 3h00 du mat ! Le bébé qui pleure, la
nuit froide et glacée Agj
bed Ali fonce au terrain ! La bas c’était la
guerre ! Je prends mon fauteuil directorial, les tanhoys**** braillent, les téléphones
crépitent et les dispos s’affichent ! Dehors, dans la nuit,
les premières missions décollent ! Ouf ! C’est parti,
ON est dans les temps… ya pu ka attendre que ça sèche et le
calme renaît ! "A vos rangs, fixe ! " C’est le
Chef (le colonel Cdt la Base) qui se pointe en personne.
J’entreprends de lui présenter le panel de situation. Très beau,
très clair ce tableau des ordres, des objectifs, des dispos,
très bien tenu (deux aspi, 5 bidasses, y avait ce ky fallait)
donc j’étais content de moi (comme dab). Ouai, m’interrompt le
"Charme", je vois !… Rebecca ça baigne ! Mais passons dans
votre bureau. On ferme la porte et, sévèrement, le visage
brusquement fermé, il me déclare : "Dites moi, vous savez
que le CLA dépend de vous ? Euh ! Oui, mon
Colonel ! Et bien en venant, j’ai pu constater que les
chiottes n’avaient pas été faites ! " La fatigue, la
surprise (je m’attendais à n’importe quoi). J’ai éclaté d’un
rire nerveux, franc et massif ! "Et ça vous fait
rire ? " Ben oui ! Mon Colonel, tout le monde est sur
le pont, on fait la guerre, et vous, vous avez le temps d’aller
inspecter les WC ! Je suis surpris ! Rassurez-vous,
ai-je eu le culot d’ajouter, maintenant que je connais vos
priorités… je ferai en sorte de… !
Il a
souri ! Oui! qu’il a dit :" faites en sorte !"et il
est reparti… J + 9, on était dans les billes, Charl’s avait
raison. Je venais de subir "The Test". Par la suite
le Charme m’a foutu une paix royale, que dis-je amicale, on
chassait ensemble tous les samedi et c’est lui qui, beaucoup
plus tard, m’a fait entrer chez Marcel.
Le temps
s’est par la suite déroulé dans un contexte qui devenait de plus
en plus pesant au fil des jours et des semaines. Organisation
Brigade, c’était aussi lourd que l’avion. Ambiance du
Commandement Escadre, Léon avait laissé la place à Jeannot, un
copain de toujours (bien que mon ancien), un pilote
exceptionnel, (qui se rappelle encore le jour où, en
contradiction avec tous les ordres qui lui commandaient
impérativement l'éjection, il avait choisi,et réussi
l'atterrissage en électrique-électrique). C'était une force de
la nature et voilà qu’il n’avait pas su prendre le virage
"Charme", et celui-ci l’avait broyé et le piétinait allègrement
à la moindre occasion.
Remarquez
bien, la croûte restait encore épaisse, la pêche, la chasse (au
fusil), la Forêt Noire, les champignons, le ski… il aurait été
difficile de faire la fine bouche, mais la mission et l’ambiance
avaient tout transformé : la Chasse était véritablement
devenue Bombardière !
Oh, de temps
en temps il y avait une mission sympa , avec décollage jato
(encore que le largage du support basse altitude, à basse
vitesse, pleine charge, de nuit et sur un champ… ça manquait de
poésie). Avec le pétrole emporté on pouvait se farcir l’attaque
du terrain de Pise, Italie, en profil Haut-Bas-Bas !
Descente/attaque à grande vitesse et retour en très basse
altitude à vi-max jusqu’à franchir les Alpes ! Après on
était pratiquement chez nous mais toute la Chasse Italienne nous
courrait après ! Super ! Bien sûr j’ai ramené une
photo collimatée de la tour de Pise (en faisant bien attention à
ne pas l’accrocher quand même… ça aurait fait désordre !)
Le refuge des Alpes, c’était une autre affaire, on se sentait
véritablement poursuivis, traqués, en patrouille de combat en
radada intégral… à viser le Mont Blanc, c’était très réaliste on
se prenait au jeu ! 2H20 de plein bonheur. Le survol des
Alpes à basse altitude, encore une splendeur… mais, en survol
montagne j’ai toujours eu peur de déclencher une avalanche aux
potentialités meurtrières. 2 x 84F à 350knts ça fait du bruit et
ça secoue le paysage.
Même
configuration, à 4 ou 6 avions je ne sais plus ! Attaque de
Ouargla Hassi-Messaoud depuis Boufarik en profil
Bas-Bas-Haut ! 2h10 de vol avec navigation serrée sur le
cours des ergs asséchés. Encore un grand moment de bonheur
professionnel, ce vol à très basse altitude (vraiment très) avec
des équipiers qui ne peuvent pratiquement que vous regarder et
vous suivre! Le passage (en poursuite) au travers des Portes de
Fer… quelle merveille ! Au cours de ce même déplacement sur
l’Algérie nous avions testé des interventions réelles, sans
contact radio avec les PCA sur des objectifs, marqués au
fumigène par un Broussard quelconque, mais sans contact avec lui
et en ignorant tout de l'objectif et des intentions ! On
mitraillait en aveugle. Pas très convaincant ! L’avion, le
84F, n’était véritablement pas fait pour ça.
** Giovanagéli,
un as de guerre je suis tenté de dire Bretteur et menteur sans
vergogne, mais quel chef…
*** Rebecca
était un exercice de réaction du CATac, Carabi était son pendant
du CAFDA.
**** Tanhoys : appareil de
liaison vocale entre les ops escadre et les escadrons.
Trois
anecdotes
Les Banshees
C’est alors
que se passe l’histoire des Banshees, laquelle je dois
maintenant confesser. Nous étions engagés dans un de ces
exercices périodiques au cours desquels la 6th Fleet
attaquait la France, laquelle nous étions supposés défendre
héroïquement à bord de nos "Mistraux".
Depuis
potron-minet nous avions mis deux avions en alerte à 2' en bout
de piste. Etant le chef, je "m'avais" désigné pour être le leader. Il y avait
une solide "rentrée de sud", et, comme chacun sait, dans ces
cas-là, il aurait mieux valu rester près d'un poêle dans la
Fillod qui nous était attribuée (votre luxe actuel dépassait
largement nos capacités de rêves les plus dévergondés). Il est
vrai que nous avions "La Monique" auprès du starter et que cette
chose là, c'est vous qui ne pouvez imaginer ce qu'en pouvaient
faire le Zinzin et le Limb ! (Le terrain n’étant pas clôturé,
les "étrangers civils, admirateurs des chevaliers du ciel",
pouvaient venir toucher les avions !). Bref, il pleuvait,
il faisait froid, et de quart d'heure en demi-heures, une Jeep
venait me proposer la relève, relève que je récusais vertement
en espérant que le cheeze allait bientôt venir. De temps en
temps je téléphonais à Marina (not'mère, le COZ) pour demander
"So what ?" La réponse restait immuable " No Joy, Ya person qui vole".
La tension montait malgré que nous fussions passés depuis
longtemps en 5'. J'allais raccrocher pour la nième fois
lorsque mon attention fut attirée par un sifflement aigu : 2
Banshees, jaillis subrepticement du crachin en radada, venaient
de nous straffer sans vergogne. Je tendis le biniou vers le
bruit et plein de rage demandais au c... trop-leur "Et ça, c'est
des fantômes ?" avant de raccrocher et de contempler les deux
peaux rouges qui revenaient. Ce coup-là, c'était plus pour
straffer : ils remontaient la piste en battant des ailes. Fusée
verte, lancée par la tour, et les revoilà au break. Belles bêtes
en vérité.
C'est à ce
moment que l'idée a surgi, irrésistible dans l'énervement et la
frustration de l'instant : des rameurs, USN en plus! Y peuvent
pas se poser s'ils n'ont pas un Batman ! Obviously, my dear, et
dans la foulée j'empoigne deux des panneaux, carrés et jaunes,
avec lesquels on nous affichait les données de montée pendant la
mise en route. (Sommaire peut-être, mais vachement efficace et
pratique : 30x30, avec des gros chiffres noirs ; les données
arrivaient au starter par téléphone alors que nous étions encore
sur la fréquence tour. On avait juste le temps de lire et de
noter en commençant à rouler). Muni de mes panneaux, brandis à
l'horizontale et à bout de bras, je me campe, bien en vue,
devant le tableau d'affichage. Le leader sort en dernier virage,
j'accompagne, je déroule avec lui… et me voilà avec quelques
huit tonnes de Banshee sur les bretelles ! Cet idiot–là
exécutait "mes ordres" : descendez un peu, pas tant, reprenez…
et il suivait scrupuleusement ! J'avais pas l'air d'un autre !
Quand il est arrivé en bout de bande, que j'ai été sûr qu'il
était dessus, j'ai violemment croisé les bras. Il a coupé les
gaz et a pris contact avec la planète (un peu brutalement !). Il
a fait un gros (très) boum et s'est définitivement posé. Dois-je
vous dire que son équipier a dû se poser tout seul et que je
n'ai rien fait pour tenter de l'aider? Sur ce, le Klaxon a
braillé, j'ai sauté dans mon zinc et décollé fissah avec mon
fidèle équipier. On n'est pas sortis de la couche avant 35 000',
on a tourné dessus et dedans pendant une bonne heure, on est
rentré, on a percé, on s'est posés. Le temps était toujours
aussi dégueu (vraiment une rentrée de sud !). Le temps de
remplir le CR de mission à l'Escadre et de revenir sous la pluie
à la fillod et j'ai trouvé mon second (J.R.) hilare. "A te v'la
enfin, qu'il a dit. Tu as du pot d'avoir mis longtemps, ya un
énorme peau-rouge furieux qui te cherchait. Il voulait te casser
la g…! Dis-moi ! C'est vrai que tu as joué au batman avec lui ?"
Je n'ai pas daigné répondre.
Mais
l'histoire ne s'arrête pas là. Très peu de temps après, le
"Ronéo" m'ayant attribué un siège d'officier DAT à l'EMAA/3B,
j'avais rejoint mon poste aux Folies-Victor. Il arriva que mon
chef me convoqua un jour : "Vous allez aller demain matin au
palais de Chaillot. Tenue 2. Vous représenterez le 3B à la
conférence des exercices de l'OTAN". Revêtu de mon uniforme,
arborant (fièrement) mes ailes de US-Senior-Pilot (noblesse
oblige), et agissant conformément aux ordres de mon chef, j'y
fus. Je n'avais strictement rien à faire, sinon essayer
d'écouter et de prendre des notes. Sur le coup des 10h15
cependant, et suivant les coutumes US je suis rapellé par un énormous USN-Admiral
avec une triple rangée de stripes encore plus énormes. Il fusillait mes wings avec son cigare: "Hey You! Just let me know. Do you speak English? Yesse Sir ! Are-You a
fighter-pilot ? Yesse Sir! (shame on me…) mais il y a
prescription !
Non ? Alors,
dites-moi : est-il exact que vous ayez des "batman" sur vos
terrains de chasse ?" Je dois, à ma courte honte, (très courte,
mais non moins ignominieuse) honte sur moi, avouer que j'ai
molli. J'ai répondu en indiquant que nous n'avions pas ça dans
nos cartons. "Thank-You, qu'il a dit en me quittant, c'est bien
ce que je pensais, un de mes guys est rentré au PA avec un
atterrissage dur et en expliquant que c'était de la faute au
french batman… je vous demande un peu !.. Il s'est foutu de
nous, damn'd rascal !". Salaud jusqu'au bout je n'ai rien fait
pour le détromper. J'en ai encore honte
#Souvenirs..souvenirs
"Le Tumble"
A l'occasion
de retrouvailles "chasse", à moins que ce ne soit à l'issue d'un
meeting quelconque, l'un de mes grands Anciens me dit en
rigolant (c'était proche du ricanement): "Je racontais justement
l'histoire de ton "Tumble" sur Cobra. L'as-tu déjà écrite ?" Il
ajouta "Non, Tu devrais !"
Cédant aux
encouragements de la foule de mes admirateurs, je vais donc
essayer de coucher sur le papier le récit de cette mémorable
aventure qui se passait à Mekhnès (Maroc) en décembre 1947.
Comme chacun
ne le sait plus, le Bell-P39-Airacobra était un très
bel avion, monoplace de chasse, qui était un peu raté malgré le
12 cylindres Allison dont il était doté. (Il fut avantageusement
remplacé par le P63 King
cobra, lequel lui ressemblait comme un frère mais se
montrait beaucoup moins vicieux). Le cockpit du P39, avion
tricycle, se présentait comme une conduite intérieure dotée du
confort made in USA. On y accédait par une porte type Peugeot
203. Une fois installé, le pilote dominait le sol et jouissait
d'une vue remarquable. C'est à la mise en route que le tableau
s'assombrissait car il réalisait immédiatement que le moteur
(contrairement à ses habitudes précédentes) se trouvait dans son
dos et que lui même chevauchait un arbre d'hélice qui vibrait à
tout rompre, à croire que le tableau de bord se mettait à
tourner (da vero, acarbi,
j'ty jure, c'était ahurissant). Quand le régime se
stabilisait tout rentrait à peu près dans l'ordre et le moteur
reprenait un murmure acceptable alors que le tableau de bord
s'immobilisait. Restait que le susdit moteur était toujours
derrière et que la notice (et les consignes aussi) indiquait que
le centrage était (très) arrière et qu'il faudrait (toujours)
en tenir compte. Vous aurez noté qu'il s'agissait d'un monoplace
et que le lâcher se faisait au briefing (n'y avait pas de
biplace, si vous voyez ce que je veux dire): il suffisait
d'avoir la connaissance, la foi… et un peu de pot !) Au
demeurant c'était un avion très plaisant et très agréable à
"conduire". Un jour où j'étais un peu long j'avais même allongé
la piste en virant direct sur le chemin du mess = 10cm de chaque
côté des roues (z'auriez du voir la tronche des piétons gerbant
sur les côtés pour me laisser la place). Comme j'avais rien
cassé… personne avait rien dit!
Le décor
étant ainsi planté, je préciserai que j'étais déjà un chaud
pilote (hot pilot, made in
USA) frisant les 500 heures et que j'avais gagné un
concours de voltige sur le Hurricane qui précédait le Cobra (ce
qui sous-entend que j'avais déjà une réputation à défendre).
Or, il se
trouve que, à l'époque, Mekhnès abritait des champions
prestigieux qui vous faisaient des déclenchés à répétition sur
Dewoitine 520 et qui s'affrontaient en démonstrations
éblouissantes au-dessus de la piste: Seguin, Nédélec et bien
d'autres. Le renversement constituait l'arme ultime. Avec un
Spit on arrêtait l'avion en montée, on plantait une punaise à
hauteur des plans et il pivotait gentiment autour. C'est ainsi
que le Ned, mis au défi d'en faire autant sur P47, s'était lâché
sur la bête, était revenu à la verticale-piste autour des 1500'
et avait entrepris de relever le challenge. Premier coup = un
éventail ! "Ah, Ah", ricana la foule. Deuxième coup = départ en
vrille = un tour. Troisième tour = départ en vrille = un
demi-tour… Hurlements du colonel, arrivé sur les lieux, "dites à
ce zèbre d'arrêter immédiatement ses c… !" Trop tard, le
quatrième coup était déjà parti et le P47, dompté, pivotait
sagement autour de sa punaise. Le Ned, retourné au sol, déclara
sereinement "Z'avez vu! Votre chaudière c'est un engin comme les
autres, suffit de trouver manière.
D'accord, le
premier coup il m'a baisé, mais le deuxième c'était volontaire
(juste pour voir comment il partait), et le troisième c'est moi
qui lui ai montré". Un sacré pilote ce Ned! Comme j'étais copain
avec lui je m'en fus discrètement le consulter pour savoir
comment éviter le fameux éventail en Cobra. Il m'expliqua que le
secret consistait à trouver le "badin zéro": "Tu pars (par
exemple) le premier coup à 220 nœuds et puis tu baisses de 5
nœuds en 5 nœuds jusqu'à trouver le bon départ. Quand ça passe à
zéro, tu bascules" m'expliqua-t-il avec patience. Mieux il me
fit même une démo alors que je l'accompagnais en convoyage A24
sur Rabat. Effectivement le badin se trouvait à zéro quand il
avait botté!! Sacré Ned, easy
show! Y
restait plus qu'à appliquer… !
Ce jour-là
donc, (c'est ici que commence l'histoire) je partais avec le Lt
Figuières et un autre équipier pour une "mission de voltige
relative". Pendant que le premier équipier s'amusait avec le CP,
le deuxième (moi en l'espèce) attendait sur son axe en faisant
de la voltige à 10 000'. Au bout de 25' on échangeait les
postes. Demeuré seul, je démarre donc mes séquences d'accro et
me mets bien sûr en mesure d'appliquer la recette du Ned.
Premier coup= l’éventail ! Deuxième coup = itou ! Troisième (ou
quatrième, j'ai oublié) Le Sabah ! Cul par-dessus tête, c'est le
cas de dire ! Le nez, la queue, le nez, la queue, le nez et le
manche déchaîné qui me battait follement les jambes et que
j'avais eu toutes les peines du monde à récupérer. Panique à
bord, ce f… piège basculait autour d'une mystérieuse aiguille
enfilée dans ses plans et l'altimètre !!!
Je ne vous
raconte pas : ça tournait à toute allure. Brusquement j'ai vu
passer "6 000'" et la phrase inscrite en lettres de feu dans mes
neurones quelques deux ans plus tôt "six thousands feet anyway
bell out» a produit son effet salvateur: j'ai tiré sur la
goupille et poussé la porte. Celle-ci a disparu sans protester
et je me suis retrouvé sur le plan à lutter contre un vent de
tempête. J'allais plonger dans le vide, comme on me l'avait
appris, lorsque le Tumble a stoppé ses cabrioles et que nous
nous sommes (le Cobra et moi) retrouvés en léger piqué. Trop
bête, ai-je sur le plan (et le champ) décidé, remontons à bord.
Il me fallut (avec précaution) enjamber le manche redevenu
stable, remettre des gaz et regarder remonter le badin
"Attention mec ! La perte de vitesse secondaire c'est la mort"
me suis-je ordonné in
petto et j'ai attendu 220 nœuds pour tirer doucement sur
le manche.
C'est le
moment où j'ai (un peu) décapité un eucalyptus (j'ai ramené qq.
feuilles dans les radiateurs latéraux). De nouveau ça baignait
(presque), si ce n'est que le courant d'air avec l'absence de
porte !!! Fallait voir et ressentir. Je m'étais solidement brêlé
et je tenais fermement les filasses radio (écouteurs +
laryngo+…) dans la gueule (autrement ça s'envolait et ça me
tirait dehors). Bref, ayant repris la main, mes esprits et le
contrôle des opérations, je me suis mis en demeure de retrouver
mon leader. Je suis donc remonté à 10 000' (en ramant un peu) et
je l'ai attendu au point de rendez-vous. Il n'a pas tardé à
paraître sur mon côté tribord. "Vert deux, qu'il m'a ordonné,
commencez vos virages relatifs, je pars au 90°!" Non, ai-je
voulu crier (De fait, ça a du murmurer "HHohon", avec les
filasses dans la bouche). Indigné cependant par cette réponse
inadaptée, le Figuières s'est retourné en répétant son ordre.
HON/hon! Ai-je confirmé en essayant de montrer mon côté gauche.
J'étais plein pot, mais dur, très dur de passer dessous pour
croiser.
Enfin, j'y
suis arrivé et il a compris que qq. chose ne tournait pas rond.
"Ok! On rentre, a t-il consenti en se mettant en patrouille sur
moi". La suite est sans intérêt = nous sommes rentrés et j'étais
entier. J'ai expliqué et nous nous sommes retrouvés devant le
Cdt de Groupe (Pissote ou Vinçotte, j'ai oublié) lequel m'a
écouté avant de conclure "Si je vous comprends bien, dès que
vous lui avez f… la paix, il s'est remis à voler normalement cet
avion. Enfin vous ne l’avez pas cassé… C'est bien!"
N'était le
respect dû à son grade et à ses fonctions, je lui aurais bien
craché à la g… ! Le lendemain, un quidam autochtone et qui
guidait un âne a rapporté la porte dont la glace n'était même
pas ébréchée. Il avait suffi de la remettre en place avec des
goupilles neuves.
A quelques
jours de là, mon camarade Hellouin, qui avait dû oublier la
règle, ou qui a eu un malaise, ou qui n'a pas eu mon pot, s'est
planté sous nos yeux avec son P47, en vrille à plat depuis 10
000'. C'était en combat tournoyant, je crois.
C'est comme
cela que suis entré dans la liste (très courte parait-il = happy few) des
survivants du "Tumble-P39". En prime, moi, j'avais ramené le
bestiaux à l'écurie. Je dédie ce récit à la mémoire de mon bien
aimé et très respecté Cdt de Groupe Michel B. de St Venant,
lequel, du temps où il interprétait "Le Marab" légendaire de
"Chasseurs mes Frères", avait joué lui-aussi au "Tumble"… mais
lui, il avait suivi la porte !
55000 pieds
ou encore un tour deuk!
Ce jour-là,
qui devait se situer aux alentours de novembre 54, j'étais
mandaté pour effectuer un "vol d'essai" sur Mistral : vous
savez… ce genre de vol de 35/40 minutes qu'il fallait exécuter
sur les avions sortant de révision ; il y avait tout un dossier
en forme de questionnaire qu'il fallait renseigner en pointant
les données relevées (altitude, régime, vitesse, etc…) une
routine !
Lorsque ma
tâche fut accomplie = RAS. J'avais le temps et du pétrole, je
décidais de voir jusqu'où je pouvais monter… et nous partîmes
allégrement, le piège et moi, escalader le ciel… 45 000' le
vario affichait encore un bon 500'/min et tout se passait bien.
A 50 000' je disposais encore d'un honnête 2/300'… ça grimpait
toujours. C'est à 55 000' que les choses se sont gâtées… le
piège a commencé à renâcler, très instable avec un Vi devenue très faible,
voisine du décochage, la
t4 tutoyait le rouge et je songeais à redescendre lorsque,
brutalement le Nene a protesté dans un grondement proche de
l'explosion…
Sans autre
avertissement, un véritable sabbat-magnum s'est déclenché… ça
cognait dans tous les sens ! Et nous nous sommes tous retrouvés,
le piège, le Nene, toujours tournant (j'avais réduit d'instinct)
et moi-même (un peu sonné, quand même) autour des 30/35 000'. Le
temps de tout remettre en ordre (le piège et mes esprits), de
tester le moulin avec une
t4 redevenue normale… on est rentrés à la maison… J'avais homologué mon
record d'altitude (personnel) ! Il est, depuis, resté
définitif... Je ne suis plus jamais monté si haut ! J'en ai
alors discrètement parlé avec quelques initiés de confiance pour
analyser et pour réaliser que j'étais entré tout à la fois en
compressibilité et en décrochage… c'est vrai, je me rappelais
l'aiguille du Mach entrait dans la barrière quand tout avait
pété... sauf, bien heureusement la verrière ! Ca aussi c'était
vrai et c'est là, sans doute, que se situait réellement le tour
deuk…si elle avait claqué cette verrière…je risquais la syncope
! Mais comme j'avais du pot… ça s'est bien terminé !
L'inconscience sourit aux audacieux ! Audaces fortuna juvat,
disaient déjà nos sages de l'antiquité, à une époque où Blériot
et Ader n'étaient pas nés encore. Pour faire/réaliser
un joli tour deuk, suffit d'avoir une bonne occase ! Que celui
qui n'en a jamais fait me tire la première claque. N'empêche…
c'était un sacré bon avion ce Mistral !
EN GUISE
DE CONCLUSION
Rentrant de
Mont de Marsan et voulant m’asseoir devant mon PC pour écrire
ce qui précède, j’ai trouvé l’un de mes petits-fils déjà
installé. Il pilotait (manche avec restitution d’effort et
tout le toutim) une trapanelle qu’il menait à l’attéro ; j’ai
émis la prétention de le guider de mes conseils éclairés et il
s’est posé impeccablement par petits bonds successifs. Une
fois stabilisé il s’est mis à taxier vent du bas en se
dirigeant d’une main assurée vers le hangar.
Freine,
ai-je crié !... Il a éclaté de rire et mis plein pot en
encadrant l’édifice ! Tout a explosé = retour à la case
départ pour une nouvelle mise en route. " Tu vois ce n’est pas
grave…on peut repartir" ! J’ai alors compris ce qui
différencierait toujours un simulateur et un vol réel. Dans le
premier il n’y a pas de stress. Au pis, un instructeur !
Comme
annoncé, j’ai donc repris le fil de mes souvenirs, consolidé
de ci de là… amis, complices, conseillers, mémoires
éléphantesques de certains, le Net, les carnets de vol, des
archives personnelles, les remords, les regrets, etc… !
Rien que de très contrôlé en somme.
Merci
JAB bon vent