COMMUNICATION DE MONSIEUR CLAUDE PERRIN
René Fonck, as des as et VISIONNAIRE
Christian Moench fut un pilote de raid dont la carrière fut très brève.
René Fonck compte parmi les plus éblouissants pilotes de chasse de tous les temps. Il figure au plus haut du palmarès des héros de la première guerre mondiale. Un des rares survivants du prestigieux Groupe des Cigognes (dont une escadrille, la S.103, portait son nom), il eut une carrière de plus longue durée et marqua son temps, après la fin des hostilités, durant l’entre-deux-guerres, par ses dons de visionnaire hors pair. Son attitude lors de la deuxième guerre mondiale a été sanctionnée par le manichéisme de bon aloi qui s’est instauré dans notre pays depuis ces sombres années, une chape de silence s’étant abattue sur sa mémoire au point qu’aucun ouvrage d’ensemble, aucune biographie ne lui a été consacrée. Aucun monument ne lui est dédié, et, à Paris, une minuscule rue, sur l’ancienne zone, près de la Porte des Lilas, porte son nom. A l’opposé, les salixois lui ont conservé une dévotion chaleureuse, lui dédiant une place, cependant qu’au Musée de Saint-Dié, une salle lui est consacrée.

René Fonck fut, en effet l’As des as non seulement de la France, mais de tous les pays membres de l’Alliance. Combattant le plus prestigieux de la première guerre mondiale, il eut l’honneur, lors du fabuleux Défilé de la Victoire du 14 juillet 1919, arborant la plus impressionnante brochette de décorations dont une Croix de guerre avec 28 palmes, d’ouvrir cette manifestation sur les Champs Elysées en brandissant le drapeau tricolore, entouré de deux autres vosgiens, Jules Py, né à Moussey, as du génie, et Georges Poirot, de Bellefontaine, près de Plombières, as de l‘infanterie. Ce n’est sûrement pas un hasard si ceux qui vivaient au plus près de la province perdue firent partie du carré des plus valeureux combattants. Pour René Fonck, fils d’un sagard habitant Saulcy-sur-Meurthe, près de Saint-Dié, exilé du fait de l’annexion de l’Alsace, il vivait cette spoliation territoriale comme une grande injustice, et cette meurtrissure sera le tourment de son adolescence, mais aussi l’aiguillon de sa rage de vaincre. 

Né en 1894, il est l’aîné de deux soeurs dont l’une, Mme Panin, s’illustrera dans la Résistance lors de la deuxième guerre mondiale. Un accident mortel le  privera de son père à l’âge de 4 ans. Il a 20 ans lors de la déclaration de guerre et bénéficie d’une formation professionnelle acquise dans le tissage et les ateliers de mécanique, ce qui constituera pour lui, un atout majeur pour tous les aspects techniques du vol et de l‘armement de ses avions successifs. 
 
Appelé sous les drapeaux le 22 août 1914, il apprend qu’il sera affecté au 1er Groupe d’Aviation, mais, il doit d’abord faire ses classes à Epinal. Ce n’est que le 15 février 1915 qu’il est dirigé à Saint-Cyr pour un stage théorique d’élève pilote de 18 jours ; la méthode pédagogique employée par ses instructeurs, trop abstraite a son goût, a le don de l’exaspérer. C’est ensuite la formation pratique au vol en baie de Somme, au Crotoy, haut-lieu déjà évoqué plus haut. Les Caudron G2 et G3 y sont les outils aériens de base. Le brevet de pilote est obtenu le 18 avril 1915. L’affectation à une unité combattante est immédiate. Apparemment, à ce moment du conflit, il n’y a pas encore de tests psycho-physiologiques pour sélectionner les pilotes en vue de ce type d’affectation: ce n’est qu’en 1916 que sera mise au point, à l’instigation de Marchoux, Camus et Nepper une batterie de tests: mesure des temps de réaction visuelle, auditive et tactile, contrôle des émotions et mesure de la fatigabilité. Fonck est envoyé à l’escadrille du 2ème corps colonial, la Caudron 47, spécialisée dans la reconnaissance aérienne avec photographies et réglage d’artillerie, basée près de Corcieux. Le revoici dans ses Vosges natales. Les avions ne sont pas armés et les rencontres avec des Taube ou des Aviatk ne sont pas rares. Il emporte une carabine à bord. Il est amené à maintes reprises à survoler la province perdue et se retrouve une fois, un peu par hasard, au-dessus de Strasbourg, ce qui suscite chez lui une intense émotion. Il participe à un bombardement de représailles sur Fribourg en Brisgau. C’est sa dernière mission vosgienne avant le départ de l’escadrille en Champagne, en pleins préparatifs de l’offensive de septembre 1915. Sa courageuse attitude lors de multiples vols de reconnaissance à longue portée et de réglage de tirs lui vaut, le 27 novembre 1915 sa première citation à l’ordre de l’Armée. Durant cette période, sa première victoire aérienne a été obtenue: son observateur, le lieutenant Romazotti ayant abattu un Aviatik. Il faut, en effet savoir que les avions de reconnaissance, les premiers utilisés sur le front, étaient conçus en «tandem», le pilote étant en quelque sorte le «chauffeur» sous les ordres d’un supérieur qui dirigeait les opérations, observateur qui se doublera bientôt d‘un mitrailleur. L’idée de munir les avions d’un dispositif de combat n’est pas apparue immédiatement. Ce qui fait qu’au début des hostilités, les pilotes emportaient qui un sabre, qui un pistolet, qui une carabine (selon son arme de rattachement)! Le premier combat aérien est du à une initiative individuelle. Celle du sergent Joseph Frantz, qui, excédé par les intrusions au dessus de «son» terrain d’un Aviatik, fait fixer une mitrailleuse sur son Voisin et le mécano Quénault vient à bout de l’ennemi en 47 cartouches le 5 octobre 1914, date historique puisque c’est celle du premier combat aérien se terminant par l’élimination de l’adversaire. Nous devons à René Fonck lui-même, en une brève synthèse, l’évolution de l’affectation de l’avion aux différentes missions militaires lors de la guerre 1914-1918, dans son ouvrage «l’Aviation et la sécurité militaire française» paru en 1924. Voici ce que textuellement, il en dit : «On eût pu prévoir que le premier rôle militaire de l’avion serait l’observation. Car, l’idée d’utiliser des machines aéronautiques pour étudier les phases d’un combat remontait aux premières découvertes aérostatiques. Tout le monde a, présent à la mémoire, l’emploi des ballons par les armées de la Première République (bataille de Fleurus). De fait, au début de la guerre, les avions, grâce à l’immense champ visuel que permet leur altitude, furent employés immédiatement pour la reconnaissance. Un Etat-major faisait mettre en route un appareil, biplace par exemple, avec l’ordre de rapporter des renseignements sur les mouvements de troupes en telle ou telle région. On sait, dans cet ordre d’idée, le rôle joué par un avion peu avant la bataille de la Marne. Il est intéressant de noter que ce genre de service, qui correspondait bien aux nécessités d’une guerre de mouvement, était aussi le plus simple à réclamer de l’avion. D’autres missions telles que le réglage du tir de l’artillerie, le bombardements de buts terrestres, ne furent demandées que petit à petit. Car elles supposaient pour chaque appareil des qualités propres qui ne furent réalisées que plus tard, à de rares exceptions près. On eut d’abord le réglage de tir par signalisation optique ; puis, lorsque le poids utile des avions eût augmenté, on y installa des postes de T.S.F, qui permirent de se maintenir en liaison constante avec la batterie. Mais, à mesure que l’avion augmentait d’utilité, il gênait davantage l’ennemi et je me rappelle, à ce sujet, mes premiers combats armé d’une carabine. On avait compris que le duel aérien était fatal! Commencé dès les premiers mois, il se généralisa lorsqu’on fut arrivé à monter une ou plusieurs mitrailleuses sur le fuselage.
Certains aviateurs se spécialisèrent dans la destruction des appareils adverses: on eut l’aviation de chasse».
Celle-ci était donc une fatalité inéluctable, et Fonck poursuit : «Ainsi naissaient les différentes spécialités d’aviation, et, dans chacune, des appareils particuliers. Quelques coups heureux réussis par des pilotes qui avaient emmené une ou deux bombes, incitèrent à accroître le poids utile des appareils qu’on voulait consacrer au bombardement. Ainsi se dégagèrent, par une logique inhérente à la nature même de l’aviation militaire, trois grandes spécialités: l’aviation de reconnaissance et de réglage (dite aviation de travail), l’aviation de chasse, l’aviation de bombardement».
Fonck revient plus loin, dans le même ouvrage, sur ce sujet : «Durant le grand conflit, les combats ayant abouti très vite à une stabilisation du front, l’aviation qui avait débuté, on l’a vu, comme auxiliaire de l’infanterie, resta attachée, comme par un lien invisible aux alentours de la tranchée. 
Cette particularité empêcha de voir tout de suite que la puissance de destruction dont elle était capable lui permettait d’aller très loin sur les arrières pour, en quelque sorte, couper à leur naissance les racines industrielles de la guerre».

Notons que Nancy fut le siège de tentatives de ce genre, comme nous l’avons rapporté à propos de Christian Moench (bombardement de 
Ludwigshaffen-Oppau).
Un fait d’une portée historique considérable s’est produit en mars 1918, mais la leçon ne semble pas en avoir été immédiatement tirée pour l’avenir: l’offensive allemande avait disloqué le front des alliés dans la Somme à la jonction entre les forces anglaises et les forces françaises. Le front anglais s’était enfoncé dans la région d’Amiens, et, pour la première fois, il a alors été fait appel à l’aviation comme à une force autonome à part entière et non plus comme à une auxiliaire de l’infanterie ou de l’artillerie. Les avions ont été rameutés de toutes parts pour ce que Fonck a appelé «la charge des aviateurs». Les avions affluèrent et menèrent l’attaque au ras des baïonnettes, mitraillant les masses humaines qui donnaient l’assaut, créant la confusion en faisant cabrer les chevaux et renverser les attelages. Des bombes furent jetées sur les troupes en marche, colonnes et convois. L’offensive fut, sinon arrêtée, du moins ralentie. C’était la première fois qu’un grand succès stratégique était obtenu par l’intervention exclusive de l’aviation.
Une telle réussite était si inattendue que nos états-major ne s’en rendirent pas compte immédiatement et qu’un temps précieux fut perdu à la reconquête du terrain perdu.
En fait, on peut considérer que l’aviation de chasse est effectivement née lorsqu’on a pu être mis au point le tir dans le champ de l’hélice. Je n’ai pas l’intention de développer aujourd’hui les étapes qui amenèrent à ce résultat du côté français. Citons, pour la petite histoire, l’anecdote concernant un des frères Morane qui eut, chez Jean Cocteau une illumination révélatrice, comparable à celle de la pomme de Newton, en découvrant qu’une photo de Verlaine était parfaitement identifiable bien que située derrière un ventilateur en marche. Ce constat mena à une concertation avec Roland Garros qui conduisit à la première étape, celle de la conception de déflecteurs métalliques bidirectionnels installés sur la racine des pales d’hélice permettant d’évacuer les balles qui risquaient de sectionner celles-ci. Il y eut bien sûr, dans les deux camps, des mises au point successives qui aboutirent à un dispositif commandé par le moteur lui-même et qui fut plus fiable et plus efficace que ce premier pas technique. A partir du moment où une, puis deux mitrailleuses ainsi couplées furent installées, seul maître à bord d’un monoplace, le pilote, devenu mitrailleur, «visait» sa cible avec son avion, l’aviation de chasse avait atteint sa majorité pour cette guerre-là, l’ultime étape étant le canon.
Revenons à René Fonck, pilote de biplaces d’observation. Pendant l’hiver 1915, les effectifs aériens augmentent insensiblement des deux côtés des lignes; on installe des mitrailleuses sur des avions  biplaces, mais, soit que les servants n’en maîtrisent pas l’emploi, soit que ces armes ne soient pas encore au point, le résultat n’est guère probant. En revanche, compétence et matériel aidant, les missions photographiques deviennent de plus en plus performantes: l’ennemi ne s’y trompe pas et fait une chasse nourrie aux avions de reconnaissance.
Fonck se pose alors la question de son inefficacité en combat aérien.
Car le triste bilan est là: s’il a effectué avec succès 24 réglages de tir et 13 reconnaissances à longue portée, il a aussi engagé 6 combats sans résultat. Il va alors réaliser le 6 août 1916 un exploit qui va le signaler à l’attention de ses chefs tant il témoigne de pugnacité et d’efficacité: il isole au cours d’un affrontement avec deux Rumpler (avions très lourds et peu maniables) celui qui lui parait le moins pugnace, il le pourchasse en décrivant des spirales descendantes, l’oblige à descendre vers nos lignes depuis l’altitude de 4 000 m, et à se poser, blessant enfin le pilote pour l’empêcher d’incendier son avion, faisant donc prisonniers «deux boches sans blessure qui ont volontairement capitulé sur un avion en bon état».
Cet exploit sera réitéré le 28 mars 1917 par Lionel de Marmier.
«J ‘ai pour votre 103 un jeune pilote qui a déjà remporté deux victoires sur Caudron bimoteur» (avion de reconnaissance !) téléphone alors le commandant Escudié, commandant l’escadrille C 47 (celle de Fonck) au capitaine d’Harcourt. Ce coup de fil décidera du sort de Fonck: il apprend la décision de l’affecter à la chasse lors d’une permission au logis maternel vosgien. Après un stage de 10 jours au Plessis-Belleville pour se familiariser avec les avions de chasse, il se présente le 25 avril 1917 au groupe de combat n° 12 au terrain de Bonne-Maison, près de Fismes. Il est reçu par le chef de groupe, un personnage hors-série, le commandant Antonin Brocard (1885-1950) qui a sous ses ordres les 4 plus belles escadrilles de France. Celles des Cigognes.
L’impulsion pour développer une aviation de chasse venait du général Philippe Pétain : on retient de lui cette interpellation : «Rose, balayez-moi le ciel, je suis aveugle ! Si nous sommes chassés du ciel, Verdun est perdu». Qui est ce Rose ainsi interpellé et qui n’a pu que constater à son arrivée à Verdun, le 24 février 1916 la domination sans partage du ciel par l’ennemi ?
Le baron de Tricornot, marquis de Rose (1876-1916) est considéré comme l’organisateur de la chasse française lors de la première guerre mondiale. Sorti de Saint-Cyr en 1897, brillant cavalier, il avait été le premier pilote breveté militaire. Devenu chef des escadrilles de la Vème Armée, il patronnait peu après le service aéronautique. Il devait être victime d’un accident stupide: panne de moteur avec décrochage au décollage le 12 mai 1916. 
Dés le 2 mars 1916, il avait obtenu l’envoi à Verdun de 15 escadrilles d’interception.
Historiquement, c’est très exactement le 1er mars 1915 qu’il avait convoqué dans une maison bourgeoise de Champagne, à Jonchery-sur- Vesle, transformée en bureau d’état-major, onze pilotes (dont huit issus comme lui de la cavalerie) auxquels il expliqua que désormais, le rôle de l’aviation ne se bornerait plus à la reconnaissance et à l’observation et que, tous les huit appartenaient à une escadrille de chasse, la première escadrille de chasse.
Voilà donc Fonck à pied d’oeuvre, pourrait-on dire, pour forger les éléments constitutifs de sa gloire. L’essentiel de la carrière militaire qui a valu à Fonck toute sa réputation pendant cette guerre s’est donc déroulé du 25 avril 1917 au 11 novembre 1918 ; elle s’est déroulée au sein d’une des 4 escadrilles du groupe des Cigognes, la Spa 103, commandée par le capitaine d’Harcourt, celui-là même qui avait reçu le coup de fil du commandant Escudié lui recommandant Fonck, escadrille qui portera plus tard le nom de Fonck. Rappelons pour mémoire les 3 autres: la S.26 de Garros, la S.53 de Guynemer, la S.67 de Navarre.
L’histoire proprement dite de ces escadrilles comporte de graves lacunes dues à des incendies de baraquements hébergeant les archives. Le plus grave eut lieu de nuit en septembre 1916 et eut raison des archives de 1914. Celles allant d’octobre 1916 à juin 1917 subirent ultérieurement le même sort. Ce qui frappe le nouveau venu quand il arrive aux Cigognes, ce qui le fascine même, c’est l’héroïsme au quotidien de ses chefs comme de ses nouveaux frères d’armes; qui va de pair avec élégance, insouciance dans le danger et esprit de solidarité, ce qui suscite une émulation sans borne.
A côté des patrouilles commandées, règne une étrange liberté d’action: chacun s’organisant pour ses sorties comme il l’entend. La «popote» est le ciment qui soude ces hommes entre eux. Les techniques de combats diffèrent selon le tempérament de chacun: selon la boutade de Jean d’Harcourt, «Guynemer, c’était la fougue, Fonck, c’était la technique» . Fonck n’appréciait pas la témérité mal placée, celle de Letourneau, celle de Roland Garros au retour de sa longue détention. Il a une très vive admiration pour Nungesser, héros à qui la guerre n’a laissé d’entier que le coeur, car, souvent blessé, Nungesser remontait à peine guéri dans son appareil. Un autre lorrain qui l’a accueilli avec chaleur, et qui partage avec lui le sentiment de la grande injustice, a également droit à toute son admiration, c’est René Dorme, le père Dorme surnommé aussi l’increvable car il ramenait toujours un avion indemne. 
Fonck résumait le débat dans une formule : «le but est de tuer en épargnant sa vie. Moi, je me bats sur mes atouts». Et, des atouts, il en avait: à son propos, Boyau, un fameux rugbyman d’avant 14, l’as aux 32 victoires, déclarait quelques jours avant d’être lui-même abattu : «Fonck dépasse tout ce que l’on peut imaginer. Ce n’est pas un homme, c’est un oiseau de proie. Là-haut, il sent l’ennemi, il en distingue nettement à 8 ou 10 km sans être vu. Il choisit sa proie. Quelques balles suffisent. Il n’y a jamais eu de riposte».
Il est vrai que Fonck disposait d’une acuité visuelle exceptionnelle lui permettant de percevoir et d’identifier des avions à des distances où ceux à qui il les désignaient ne les voyaient pas. Cette acuité s’assortissait d’une capacité d’intégration et d’une faculté de mémorisation lui permettant de peindre avec talent sur la toile même des avions abattus les phases les plus représentatives des affrontements aériens qu‘il venait de vivre. 
Il bénéficiait également d’une résistance à l’hypoxie lui permettant d’atteindre des altitudes très élevées, sans, bien entendu le secours de masques à oxygène et d’y rester en poste d’observation jusqu’à découverte d’une formation ennemie sur laquelle il fondait comme l’épervier, abattant d’une courte salve et en priorité l’avion lui paraissant témoigner de la meilleure maîtrise de son pilote. Il disait placer ses balles comme à la main. Mais, certaines configurations de vol obligeaient à tirer plus de vingt mètres en avant de l’avion ennemi. L’engagement pouvait alors se poursuivre selon un plan préétabli mais modulable. Fonck a réalisé un triplé en six secondes ! En mai et septembre 1918, il a accompli ainsi à deux reprises un sextuplé dans la journée! Il indique être parvenu à une telle virtuosité qu’il était capable de tirer l’adversaire en n’importe quelle configuration de vol. Cette virtuosité était au service d’un implacable sang-froid, car, une situation imprévue pouvait se présenter. En outre, dans les affrontements en mêlées, il fallait contrôler les jeunes coéquipiers qui lui étaient adjoints , notamment vers la fin du conflit, et pouvoir leur porter secours si la situation l’exigeait. Il dit lui-même : «J’ai eu affaire aux grands as allemands; j’ai eu la patience, en combattant, d’attendre la minute d’énervement, la faute fatale, et j’en ai largement profité; mais il est indispensable pour cela de conserver toujours, avec la confiance absolue dans le succès final, le mépris le plus complet du danger».
René Fonck a terminé la guerre avec le grade de capitaine: à 25 ans, il était titulaire de 28 citations dont 27 à l’ordre de l’Armée. Il avait reçu la Médaille Militaire et la croix de la Légion d’Honneur, sa 36ème victoire lui ayant valu la rosette d’officier.  

L’entre deux guerres.
Comme beaucoup de combattants de la Première Guerre Mondiale, Fonck était obsédé par la crainte de voir surgir un nouveau conflit. Il voulait que cette guerre interminable et dévastatrice soit la dernière, la der des der, comme on disait alors et qu’on ne voie plus jamais ça. Il se fit élire député des Vosges et entra dans ce qu’on a appelé la «Chambre bleu horizon».
Au terme de son mandat, en 1924, il avait acquis une solide méfiance à l‘égard du monde politique, il avait aussi beaucoup observé, beaucoup lu, et acquis une véritable culture politique. Il ne fut pas long, comme bien d‘autres à discerner les ambiguïtés du traité de Versailles, les ferments de belligérance qu’il contenait, et à y voir ce que Lloyd George confessait à sa femme: «non pas un traité de paix, mais un traité de guerre». Il ne fut pas long non plus à remarquer l’ingéniosité avec laquelle les allemands pouvaient tromper les commissions de contrôle établies pour empêcher le redémarrage de leur industrie de guerre. Il ne tarda pas enfin à observer que de toutes les puissances de l’Alliance, la France était le seul pays à respecter scrupuleusement toutes les clauses de ce traité. Or la France sortait très affaiblie de cette guerre, restait très exposée, et allait aborder la période fatidique des années 30 en situation d’infériorité démographique par rapport à son voisin germanique. Or, il remarque que «les grandes particularités modernes qui ont vu naître le conflit mondial lui survivent... Car les causes des rivalités sont inchangées et les luttes économiques sont toujours d’actualité»... Il consigna ses réflexions dans un ouvrage extrêmement documenté, clair et concis, exprimant une grande clairvoyance et une grande pénétration d’esprit: cet ouvrage, intitulé: «l’Aviation et la Sécurité Française» est le premier d’un triptyque dont je n’ai pu me procurer les deux autres volets (qui sont : «l’Aviation et son moral» et «l’Aviation et nos colonies»). C’est un document bien construit où il expose ses vues sur la base d’un raisonnement d’une grande clairvoyance. Fonck y expose un corps de doctrine basé sur un argumentaire très solide qui est une mise en garde de ses collègues basée sur une expérience de 4 années de guerre et de 4 années de pratique parlementaire. Pendant ces 4 années là, d’ailleurs, il a beaucoup voyagé à titre officiel, dans l’Ancien et le Nouveau Monde, et a été frappé de l’intérêt suscité dans les diverses nations visitée par l’effort aérien de la France lors du dernier conflit . Ne représentait-il pas la France en qualité d’Ambassadeur extraordinaire en 1922 aux grandioses cérémonies du Centenaire de la Fondation des Etats du Brésil par dom Pedro 1er?
Ce qui le frappe, ce n’est pas seulement cet intérêt mais encore et surtout le fait qu’il s’associe à de pressantes sollicitations pour développer l’arme aéronautique et la mettre, sous l’égide de la France, au service de la civilisation. Il est ainsi amené à élaborer un projet en ce sens, dont il détaille avec minutie tous les aspects, d’un développement rationnel de l’arme aéronautique. Ce n’est pas le lieu ici de développer ces vues. Disons qu’elles reposent sur un état des lieux documenté et une vision géopolitique d’une confondante lucidité. Fonck a très bien compris que les enjeux à venir sont directement liés à l’expansion par l’impérialisme économique, germe fatal de guerre. Il prévient: «l’Amérique, l’Angleterre, le Japon, restent entre eux d’âpres concurrents, l’Italie grandit et, par ailleurs ( et c’est là un des aspects réellement prophétiques de son texte), la Russie, livrée peut-être demain à quelque Genghis-Khan, s’érige en juge du monde civilisé» (c’est écrit en 1924 !).
Sur le plan pratique, il prône une véritable révolution industrielle aéronautique impliquant un changement radical de paradigme de la part de nos instances dirigeantes, de nos bureaux ministériels, de nos chefs d’industrie ( et de leurs bureaux de recherche), et surtout de nos états-majors. Il envisage un ouleversement complet des modalités relationnelles entre Etat, Industrie et Armée, et cela à un moment où la France n‘était toujours pas dotée d‘un Ministère de l‘Aéronautique !
A une époque où, selon la remarque d’un responsable russe, «la flotte civile doit être la réserve de la flotte de guerre», ce qu’avaient parfaitement compris nos concurrents et rivaux européens et américains, il était temps de mettre fin à nos archaïsmes. Pour Fonck, l’arme aérienne doit être conçue «de haut» et non à partir des relations particulières avec marine et armée de terre. L’aspect «aviation» devrait primer dans toute discussion militaire stratégique, tactique, ou technique. Il faudrait appliquer à la production de matériel aéronautique les règles de productivité industrielle: simplification des types, répartition des frais généraux sur de grandes séries, simplification des opérations de main d’oeuvre, perfectionnement de l’outillage. Et, il entre dans le détail de tous les aspects impliqués par ces conceptions révolutionnaires, et devinant les réactions qui en découleront, il ironise : «On ne saurait mieux dire, on ne saurait mieux marquer la nécessité pour les pouvoirs dirigeants de hausser leur imagination et leur volonté à la hauteur du problème». 
Il hausse sa vision au niveau international et suggère de proposer à nos alliés une mise en commun de l’arme aérienne au service de la Paix, en quelque sorte une préfiguration d’une sorte d’O.T.A.N sous l’égide de la France. Dire qu’il n’a pas été compris est un doux euphémisme: il serait plus juste de dire qu’il bouscula et raidit contre lui, conservatismes, immobilismes, susceptibilités, routines, et privilèges divers. Et sans doute aussi qu’il contraria les appétits budgétaires des différents secteurs de l’Armée de Terre, pour lesquels l’aviation n’était qu’une intruse qui sortait de son rang de subalterne.  
Fonck ne fut pas réélu député en 1924. En qualité de Président de la Ligue aéronautique, il est envoyé en mission diplomatique à Berlin où il est reçu triomphalement. Il répond sans réticence à une invitation américaine, car ses vues, outre-Atlantique, ont retenu l’attention du gouvernement. Il pourra développer ses idées devant des auditoires attentifs. A en juger par l’évolution ultérieure quantitative et qualitative de l’aéronautique américaine, il semble qu’il ait été écouté et suivi. N’avait-il pas tout pour séduire le pragmatisme américain: le répondant personnel, les convictions, et un raisonnement sans faille?
Son séjour aux U.S.A sera marqué par un échec cuisant et tragique: celui de la première tentative de traversée de l’Atlantique d’Ouest en Est le 21 septembre 1926 ; c’est un cheval de bois au décollage au terrain de Roosevelt Field à New-York, du trimoteur lourdement chargé en carburant, le capotage, et l’embrasement immédiat avec mort de deux membres de l’équipage.
Le séjour aux U.S.A de René Fonck durera jusqu’en 1935, mais parsemé de retours sur le vieux continent. Il rencontre l’as allemand aux 69 victoires Ernst Udet à Paris en 1929, il assiste aux funérailles du roi-soldat, Albert 1er, roi des Belges en 1934. Les as des deux camps conservaient des relations d’estime par delà les frontières qui pouvaient aller jusqu’à se rendre service. Fonck aurait en quelque sorte «dépanné» Hermann Goering qui traversait une mauvaise passe et en était réduit à s’exhiber dans des spectacles aériens, en lui trouvant un emploi dans une société suédoise. Ce dernier aurait conservé une vive reconnaissance pour cette attention, recevant son adversaire d’hier au Karinhall. Pendant les années noires, ce lien entre les deux hommes a été utilisé.
Dès son retour en France, Fonck est sollicité par le général Denain (1880-1952), détenteur de 1934 à 1936 du Ministère de l‘Air (la France en est enfin dotée!) et fervent adepte des idées de Fonck. Il lui confie les fonctions de conseiller technique pour la réorganisation de l’aviation de chasse.
Mais, en douze ans, les choses ont bien changé: si les idées de Fonck ont été appliquées aux U.S.A et en Allemagne, en France, la situation de l’Armée de l’Air est bien confuse. Isolée des techniques étrangères, attardée sur le plan de la recherche, encombrée de matériel périmé que l’on prolongeait (c’est apparemment toujours le cas !), l’aviation française n’était plus dans la course au moment où les puissances fascistes faisaient porter sur ce secteur un gros effort.
Ce n’étaient pas tellement les crédits qui manquaient, mais la capacité de notre industrie aéronautique à les absorber pour se dépasser elle-même.  
Il faut dénoncer pêle-mêle: plans inexécutés, lenteur de mise au point de prototypes, fluctuations continuelles de l’Etat-Major et des services techniques de l’aéronautique, rapacité de certains industriels, recherche abusive de la perfection au détriment des séries, pénurie des métaux non ferreux, retard des études de moteurs, absence totale de normalisation des pièces de rechange, crises de main d’oeuvre qualifiée, grèves, etc...
Par dessus cet ensemble peu flatteur, il y avait aussi des rivalités de conceptions stratégiques entre les trois armées, certains voulant toujours cantonner l’aviation dans un rôle peu différent de celui qu’elle avait joué durant la Première Guerre Mondiale.
Or, comme le précise en un langage «biologique» et dans une forme lapidaire l’analyste Williamson Murray, «Le front occidental de la Première Guerre Mondiale était un mécanisme adaptatif complexe qui allait donner naissance à la guerre moderne, mais à un prix exorbitant», formule qui s’applique tout particulièrement à l’Aviation.
Que pouvait faire Fonck dans un tel contexte ? Nous en étions arrivés, en ces années de la montée des périls, à un point, selon le général Denain, où seule la thèse d’une aviation unique polyvalente pouvait encore se défendre, notre pays ne pouvant plus (le temps pressait et rien n’avait été fait!) se payer le luxe de plusieurs aviations spécialisées.
Arrive le Front populaire et le colonel de réserve Fonck est rendu à la vie civile, c’est-à-dire une entreprise de fabrication d’engrais implantée à Saulcy où Fonck avait acquis une propriété ; le château des Censes à Anozel, qui fut autrefois un relais de chasse pour le roi Stanislas. A l’agressivité désormais affichée sans complexe par l’Allemagne nazie, la France opposait une nonchalance, une légèreté, et une insouciance inimaginables. Les alertes et les mises en garde réitérées d’André François-Poncet, en poste à Berlin de 1931 à 1938 restèrent sans effet. 
Après Munich, en septembre 1938, qui fut accueilli en France avec un lâche soulagement, on songe à rappeler Fonck: le 11 novembre 1938, soit 20 ans après l’Armistice, il prononce une allocution radiodiffusée très émouvante où, il exhorte les Français «face aux nuages qui obscurcissent l’horizon, à taire leurs divisions et à s’unir contre le péril commun».
Moins d’un an plus tard, il est rappelé au service de l’Armée de l’Air: mais il est trop tard pour combler notre infériorité liée à notre impréparation. La suite, vous et moi la connaissons. C’est le pacte germano-soviétique signé par Molotov et von Papen le 23 août 1939, la déclaration de guerre du 3 septembre 1939, la drôle de guerre et l’offensive foudroyante de mai 40, les «quarante jours qui ébranlèrent l’Occident» selon le titre choisi pour son livre par Benoist-Méchin. 

Les temps ingrats

Et nous en arrivons aux années noires. Les informations dont nous disposons sur René Fonck durant ce que j’ai appelé «les temps ingrats» dans mon livre sont rares et fragmentaires, parfois contradictoires. Paraît alors un ouvrage sous la plume d’André Maroselli, préfacé par René Fonck et qui a pour titre: «Le sabotage de l’Aviation Française». C’est un implacable réquisitoire reposant sur une documentation précise qui paraîtra en 1941 et qui montre l’ampleur de l’impréparation qui nous a conduit au désastre de 1940; je n’ai pas l’intention de vous infliger des chiffres: ceux que cela intéresse les trouveront dans mon livre. André Maroselli est une référence à la fois comme ancien combattant, et comme membre de la Commission de l’Air où il a côtoyé Fonck pendant de longues années. Notre retard, constate ce rapport, n’a fait que croître et embellir depuis... 1933 ! et il est essentiellement imputable, non pas au manque de moyens mais à notre mode de fonctionnement.
C’est un retard d’origine structurelle. Au lieu d’adapter notre système aux impératifs dictés par la perspective d’une guerre moderne, on a fait l’inverse: on a tenté d’adapter ces impératifs à notre système, ce qui ne pouvait qu’aboutir à l’échec. Maroselli s’est démené dans les diverses commissions auxquelles il a appartenu pour faire passer le message de l’urgence d’une réorganisation et d’une réforme de notre mode de pensée. Il fait le siège de différents cabinets ministériels, alerte l’opinion publique par voie de presse. Il a, maintes fois, et en temps voulu, en termes judicieux, suggéré, critiqué, averti, prévu. En pure perte. Le plus souvent, il a été éconduit avec une hauteur dédaigneuse et traité d’alarmiste ou d’excité. Il s’emporte, et avec une grande fermeté de langage, s’exclame: «Nous avions contre nous les routines, chères aux timorés, favorables aux paresseux, l’habileté de certains pirates, les truquages de certains prétendus experts, la suffisance arrogante des incapables, les tirs de barrage de ceux dont nos curiosités et nos critiques menaçaient les situations acquises ou les avancements et les bénéfices espérés».
Rendons hommage à ce perspicace enquêteur; il ne transmettra à la cour de justice de Riom que des chiffres et des faits, mais pas de noms. Ce n’est pas un délateur.
Dire quel était l’état d’esprit de Fonck à cette époque relève de pures spéculations. Il a été appelé auprès du Maréchal. Il lui aurait été proposé les étoiles de général qu’il aurait refusées. Ses relations avec Hermann Goering sont utilisées dans plusieurs circonstances, notamment pour préparer l’entrevue de Montoire. Il a été reproché à Fonck d’avoir tenu un rôle dans cette entrevue. S’il est intervenu, c’est indirectement et pas dans le sens qui lui est généralement reproché. Ceux qui formulent ce reproche ignorent en général qu’il y a eu deux Montoire, l’un à l’aller du voyage d’Hitler pour rejoindre Franco à Irun, le 22 octobre 1940, très discret, où seul Laval était présent. L’autre au retour de ce voyage, le 24 octobre, connu (mal) de tous. Fonck n’a participé à aucune des rencontres.
En revanche, c’est très vraisemblablement grâce à son action que l’entrevue entre Hitler et Franco fut un échec. Ayant eu vent d’un projet du chancelier allemand de traverser l’Espagne pour gagner le Maroc en proposant, pour allécher Franco, de l’aider à conquérir Gibraltar, il a pu faire contacter les Espagnols pour les prévenir par voie diplomatique, ce qui était aisé, le maréchal Pétain, ne l’oublions pas, étant encore ambassadeur de France en Espagne au début de l’année 40. Selon le récit qu’en donne Jean-François Deniau, cette entrevue entre le Fuhrer et le Caudillo fut un fiasco, ce qui ne paraît s’expliquer qu’en admettant que Franco savait d’avance ce qui allait lui être demandé et avait préparé tranquillement sa riposte.
Le nom de Fonck est également cité dans une autre circonstance, celle de l’éviction de Darlan, bête noire des occupants. Initialement, cette éviction devait conduire à la nomination d’un dénommé Barthélémy, proposition qui avait l’aval de Goering que Pétain avait fait prévenir par l’entremise de Fonck. Las, c’est Laval qui fut nommé, et c’est fort injustement qu’on fait porter à Fonck «le chapeau» de cette fausse manoeuvre.
A partir de là règne indiscutablement une ambiguïté sur le comportement de Fonck. Il serait intervenu, sans grand succès, en faveur de résistants vosgiens qui projetaient un coup de force visant à faire prisonniers des généraux allemands, le réseau ayant été démantelé par les allemands.
Il se serait réfugié dans un couvent belge puis aurait été interné à Drancy et serait sorti de ce mauvais pas sur l’intervention d’un admirateur, un colonel de la Wehrmacht.
Il règne indiscutablement une grande confusion sur ses activités durant les deux dernières années d’occupation allemande. Son nom figure en date du 24 août 1942 dans une liste de «traîtres» parue dans le magazine américain Life, à côté, il est vrai, de Sacha Guitry, Mistinguett, Maurice Chevalier, et bien d’autres, ce qui prêterait à sourire, si cette liste n’était assortie d’une invitation au meurtre!.
Il sera arrêté peu après la Libération et conduit à la Santé. Finalement, une ordonnance de non lieu le rendra à sa famille la veille de Noël 1944. Il partagera alors son temps entre la rue du Cirque à Paris et son entreprise France-Engrais à Saulcy, havre familial, où il retrouvera aussi sa soeur, Madame Panin qui s’est illustrée avec son mari dans la Résistance à l’occupant, et notamment, l’organisation d’un réseau de sauvetage de prisonniers alliés évadés et en particulier de pilotes américains.
La mort le surprendra brusquement à son domicile parisien l’aprèsmidi du 18 juin 1953; il y eut des obsèques officielles aux Invalides.
L’enterrement eut lieu à Saulcy-sur-Meurthe dans un grand recueillement de la population et des autorités locales. On ne peut en dire autant des instances officielles. René Fonck repose dans le caveau familial aux côtés du couple Panin. La place du monument aux morts lui a été dédiée.
Une plaque commémoratrice a été inaugurée au domicile parisien de Fonck, 3, rue du Cirque le 4 avril 1962 par le général d’Armée Maxime Weygand, ancien commandant en chef des armées françaises, et l’Association nationale des as.
La cérémonie fut d’une grande discrétion, mais on remarquait quand même la présence du général Alfred Heurtaux, qui fut aussi as de la première guerre aux 21 victoires, déporté en 1941, général de brigade en 1945, Compagnon de la Libération. Il y avait aussi le général d’Harcourt.
Le souvenir de René Fonck se perd insensiblement même dans sa Lorraine natale.
Celui qui avait fait de la grande injustice de l’annexion de la province dont était issue toute sa famille le moteur de sa combativité, celui qui de toutes ses forces et de toutes ses convictions avait dans l’entre-deux guerres tout tenté pour éviter que nous n’abordions un second affrontement en situation d’infériorité, celui donc à qui les Lorrains sont redevables, plus que tout autre, de son action, est en passe de tomber dans l’oubli, voire le discrédit.
Quelque jugement que l’on puisse porter sur son comportement durant la seconde guerre mondiale, on ne peut, pour l’instant, faute d’informations précises à son encontre, que lui apporter le bénéfice du doute conféré par la caution des prestigieux frères d’armes qui ont tenu à honorer son souvenir. Nous ferons nôtre la conclusion de L.-R.M. : «notre indifférence s’appelle ingratitude, et l’histoire n’est jamais indulgente envers la méconnaissance
des grandes figures qu’elle lègue».

Discussion
Après avoir remercié et félicité l’orateur pour sa communication, le président ouvre une large discussion à laquelle participent, outre lui-même, MM. Vicq, Laxenaire, Larcan et Lanher, portant sur le rôle des «As» lorrains et allemands durant la première guerre mondiale; sur le problème de l’exceptionnelle acuité visuelle de Fonck; sur l’intérêt porté par le Général de Gaulle à l’aviation militaire et sur les rôles respectifs des avions de chasse et des bombardiers ainsi que sur le fait que les Américains auraient eu recours à l’aviation dès 1918 notamment à Saint-Mihiel.